Comme je serai au Japon, j'apprends en quelques jours que
- affiche saison Chaillot 2004/2005 + ce forum : je loupe le Kabuki à Paris
- programme MCJP octobre 2004, je loupe des marionnettes !

Bon, je serai au Japon, mais je regrette quand même vivement, ne serait-ce que pour le plaisir d'y aller avec des amis pas forcément nippophiles...

Je me vengerai en y allant là bas !

Le conseil de JM est très judicieux.
Je suis allé à Kabuki-za en septembre dernier. J'ai pris une place pas chère, JPY2400. C'est d'autant plus "pas cher" que le spectacle - 3 pièces, chacune d'"humeur" différente - dure près de 5 heures avec 2 entractes permettant de... manger (et ça sent la friture dans tout le théatre :lol: ça, j'ai vraiment adoré). Bref, soyez curieux, assitez à une représentation entière, et non à la "mini représentation", le ticket à JPY 1 100, qui ne donne droit qu'à une pièce. Vous louperez tout, c'est à dire le spectacle du théatre lui même.
Et là où JM a raison, c'est pour les écouteurs. Je ne les ai pas pris. J'ai en effet suivi des cours de "musique" à l'Inalco, j'ai lu le livre de Sieffert sur le théatre japonais, je pensais que cela suffirait. En fait non, à moins d'en avoir vu souvent. Les japonais eux même ont les écouteurs, alors pourquoi jouer à "celui qui s'y connait" (c'est ce que je me suis dit, j'ai vite regretté de ne pas avoir le casque; en effet, on peut même parfois le retirer -c'est ce que faisait ma voisine par moments).
Prochaine fois, en octobre, en novembre, à Tokyo, à Kyoto , j'ai le casque !

Pour ce qui est du "sous titrage", là je doute que ce soit si "poussé" que ce que suggère JM.
Ainsi, lors de la représentation du "Pavillon aux Pivoines" à La Vilette il y a 2 ans, le sous titrage ne concernait que le texte. Je pense qu'il en sera ainsi.
Ce serait d'ailleurs injuste qu'il y ait "plus" pour le kabuki que pour les autres spectacles vivants : les opéras en français de Rameau, Lully, Campra, ..., sont sous titrés; mais à aucun moment on nous explique qui sont "les naïades", pourquoi Jupiter peut être un boeuf, pourquoi Phaeton a d'avance un destin tragique et en quoi cela pouvait parler au "courtisan" des années 1680, qui est Sylla, pourquoi le passage obligé vers un moment de sommeil dans la Tragédie Lyrique à la Française, et pourquoi donc cette place prépondérente du ballet jusqu'aux années 1750, etc... L'univers symbolique de la Tragédie Lyrique, après avoir été contesté par Diderot, Grimm et surtout Rousseau, est mort dans la 2ème moitié du siècle. Pour dépasser un simple plaisir de spectateur et comprendre, la lecture des Métamorphoses (Ovide) est le minimum des minimums. Si on peut rajouter Descartes (esthétique du Plaisir qui doit révéler la "vraie nature", qui permet également de comprendre la logique interne du Jardin Français, sensé être plus "vrai", "naturel" que la nature "sauvage"), et puis Norbert Elias, et puis...
L'accès aux expressions artistiques anciennes est forcément limité par le peu de connaissances que nous avons des "enjeux réels" que la représentation met en scène. Le bourgeois de Tokyo, épris d'une courtisane, déshérité par les siens, ruiné, aviné et errant dans la ville -grand classique du Kabuki - vaut bien le jeune héros qui défie les Dieux pour prouver sa valeur et son rang; ils sont tous 2 traversés par la même tragédie qui oppose l'Honneur et la Loi, l'obligation morale et l'obligation sociale, l'individu et la société.
Je suis toujours à la limite de la révolte quand j'entends des gens me dire que Lully, c'est pas mal, c'est joli. Non, Lully a créé un genre qui s'appelle Tragédie Lyrique, et les livrets de Quinault sont aussi profond qu'une tragédie de Corneille et portent en eux la même tension entre rang -norme morale- et loi -norme sociale- que l'ordre Louisquatrozien va aviver jusqu'à punir de peines de prison les coupables de Duels (en un mot, il interdit que l'on sauve son honneur).
Bla bla bla... J'ai un peu repensé à tout ça après avoir vu le kabuki, et je me suis dit qu'en effet les écouteurs n'auraient pas été inutiles.
Par contre, je doute que le "sous titrage" ne donne accès aux "clefs" de la représentation car elles sont également absentes dans ceux des représentations lyriques des musiques anciennes des 17 et 18ème siècles.



Bon spectacles à vous en attendant.