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Sujet : Les voraces traversent le Japon

  1. #91
    Modérateur Avatar de Heiho
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    Waouhh !

    Si avec ca on continue de nous lire, allez quelques photos, pour répondre à TK2003 il s'agit bien de Okachimachi

    Une première photo, avec l'un des premiers cerisiers en fleur.



    Ensuite, je pense que ce devait être un agent du parti (obscure) dont ous parle TB dans le chapitre ci dessus humm regardez bien comme il nous observe !





    C'est light niveau photo mais je ferais mieux la prochaine fois
    Les gros cu..
    Aie ça pique !
    Et vous, vous vivez sans ?

    Cigares
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    私は他の興味を見つけるために酒を飲む !

  2. #92
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    Par défaut Vieille connaissance

    Je le connais! Je lui ai acheté du ikura excellent deux ou trois fois.

  3. #93
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    bonjour

    bien les photos , cela serait bien pour le calendrier

  4. #94
    Modérateur Avatar de TB
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    Toujours en ballade avec Suppaiku, décidément très en langue aujourd'hui...

    Nous passons devant un théâtre de rakugo. Les villes japonaises ne gardent pas beaucoup la trace de l'histoire. « Il y a eu les bombardements de la deuxième guerre mondiale et le tremblement de terre de 1923. Il reste le cadastre, donc les rues, qui parfois sont impraticables. S'il y a bien un truc qui devrait changer c'est justement les rues, parce qu'il y a énormément de rues qui sont très étroites. Ils ne les ont pas changées, or en cas de tremblement de terre il y aurait vraiment besoin de pouvoir circuler. Ils l'ont vu avec le tremblement de terre de Kôbe : les pompiers n'ont pas pu intervenir parce que leurs camions ne pouvaient pas passer dans les petites rues. Donc tous les quartiers populaires ont cramé. » Ça n'a pas l'air facile d'être Japonais, dis-je en décrivant les travailleurs sans-domicile qui logent à notre auberge de jeunesse. « Ce n'est pas une vie facile le Japon. Il n'y a pas d'aides. Je pense que le truc en effet, quand on débarque de sa province c'est d'être très prudent au niveau de l'argent, au niveau du boulot, etc. En plus il y a un truc, là aussi, qui n'est pas modernisé au niveau des mentalités : c'est très mal vu de démissionner pour prendre un autre boulot. Ceci dit, on te garde. Au Japon on ne vire pas. J'ai des élèves qui me disent que par exemple, bon, ils vont démissionner, mais quand ils démissionnent fréquemment pour trouver un autre boulot, en général c'est qu'ils travaillent dans des entreprises étrangères. » Nous passons devant Jûji-ya, mais pas celui de Paris, une échoppe de bijoux.

    Après la politique, quel meilleur sujet que la religion ?

    Un peu plus loin nous entrons dans un sanctuaire shintô, c'est à dire un commerce comme un autre. On y trouve une publicité pour le musée du football, une sorte de ufo-catcher délivrant des portes-bonheurs, toutes sortes de troncs où jeter sa petite monnaie en échange de la bonne grâce d'un obscur kami local. « Ça n'a pas du tout la place que chez nous la religion peut avoir. La foi est obligatoire chez les catholiques et les musulmans, alors que chez les Japonais c'est un truc purement accessoire. Je ne crois pas qu'ils aient la foi. Cela me fait penser à beaucoup de juifs qui ne sont pas croyants mais qui vont participer aux rites pour resserrer les liens familiaux une fois de temps en temps. » Dans ce jinja on vend aussi des figurines, peut-être la mascotte du sanctuaire. Je m'attends à tout maintenant. Ils pourraient vendre des godemichets ici... « Globalement, de toute façon tu as des bazars qui sont ouverts. C'est très fréquents. » Les godemichets ? « Non, les bazars. Maintenant, quand il y a un matsuri, très franchement, ça ressemble quand même très fortement à... » Nous restons pensifs un instant. « Quand tu habites ici, progressivement tu t'aperçois que vraiment il n'y a pas que le monothéisme. Et qu'il n'y a pas que le système religieux qui va avec le monothéisme : l'obligation de croire, l'obligation d'avoir la foi ou un truc comme ça. On peut finalement avoir une religion qui n'a pas besoin de foi. On peut avoir une religion qui peut être entièrement basée sur des pratiques, et pas du tout sur l'existence avérée, possible ou impossible de Dieu. En tout cas chez les Japonais il n'y a pas de foi. Il y a beaucoup de choses qui me font du bien en tant que Français qui en a ras-le-bol qu'on lui dise que le conflit du proche-Orient est un truc fondamental pour l'avenir de la planète. Je ne suis pas d'accord, c'est uniquement parce que les monothéistes ont décidé que l'endroit était un endroit fondamental que éventuellement peut-être... Mais franchement, le Kashmir c'est tout aussi craignos, le Darfour, je veux pas dire, c'est un génocide... On peut continuer, on peut multiplier les cas d'endroits qui sont encore plus graves que le proche-Orient mais qui n'ont pas cette importance parce que le proche-Orient, en gros, tu as les trois monothéismes qui ont décidé que c'était le truc fondamental. Mais vu du Japon, le proche-Orient c'est un truc qui n'existe presque pas. Tout simplement parce que leur système de valeur, de toute façon, n'est pas impliqué dans ce qui se passe. Ils s'y sentent beaucoup plus impliqués parce que, globalement, c'est les États-Unis, qu'il y a une implication militaire possible. » Les Japonais ont envoyé quelques hommes faire de la figuration. « Voilà, c'est ça. Mais il n'y a pas ce truc fondamental que la planète va péter parce que le Hamas et le Fatah ne s'entendent pas. » Nous passons près de Tôdai, l'université la plus connue du pays, sans nous attarder (on ne voudrait pas de nous de toute façon), et nous changeons de quartier.

    « Vous, je ne sais pas si ça vous le fait, mais moi, de temps en temps, j'ai des relents de tremblement de terre et ce quartier fait partie des quartiers où je pense aux tremblements de terre. Encore les immeubles, ça va, mais c'est plein de petites maisons. Par ici ça fait partie des quartiers qui seront certainement les plus soumis aux destructions. Voilà un truc qui fait partie de toute la corruption générale de toute la société japonaise en fait. Normalement, ils auraient dû planifier... Ce serait un état normal, avec des élus qui sont responsables pour de vrai, ils auraient dû planifier un éloignement de la capitale des côtes — soumises à un risque de tsunami — ils auraient dû progressivement vraiment faire appliquer les normes antisismiques, détruire les îlots insalubres. Et c'est pas le cas. On s'aperçoit encore qu'il y a un bon tiers des permis de construire qui ont été donnés ces quinze dernières années qui correspondent à des trucs qui ne résisteront pas en cas de grosse secousse. » Ça, par exemple ? « Oh ça, ça ne tiendra pas, c'est visible. Même le truc soi-disant moderne là. Moi j'ai vu à côté de chez moi, ils construisent un truc... Alors la structure, elle est visiblement antisismique, etc. mais les fondations tu as l'impression que c'est un truc qui fait trois mètres, alors comme c'est un immeuble de vingt mètre, l'immeuble de vingt mètre il va se casser la gueule, quoi, tout simplement. Or, normalement, la législation au Japon c'est une profondeur égale à, je crois, la moitié de la hauteur. À Shinjuku ils ont l'autorisation de construire des tours de deux-cent mètres parce qu'ils peuvent faire reposer les fondations sur le socle rocheux qui est environ à cent mètre. On est en train de quitter le quartier un peu modernisé, justement on rentre dans des restes de quartier populaire. Faut vraiment regarder les immeubles, parce que bon, ça aura beau se casser la gueule, il y en a des jolis. Par derrière, toute cette zone là c'est ce qui s'appelle Yanaka. Au loin on voit le Tôkyô-dome. Ça vous dit un tour au Tôkyô-dome ? »

    À suivre...

  5. #95
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    Et tu as demandeé à Suppaiku l'autorisation de le <plus que citer> ?
    Nan, sans déconner tu veux que je colle quoi comme photo là, ok ok ok je vais chercher, je vais voir ce que je peux faire.

  6. #96
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    Bon,

    j'peux pas faire mieux ! Mais je crois que cela résume assez bien ton texte, non ?

    ***************



    Merci TB ^^

  7. #97
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    Excellente cette illustration ! Maintenant c'est plus clair et surtout on comprends mieux :P
    Ainsi je reconnais là la patte du grahisme de TB qui m'avait offert à l'époque, une autre authentique estampe représentant un hotel !
    Et puis je reconnais aussi le savoir faire du montage de Heiho l'illusionniste !

    Bravo.

  8. #98
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    Oh... oh... Olalala... Oh... WHOUAaaaAAAAAAAouuuuAAAAAaaaAaAAAaaaaaYAAaaaaaaaaa aaa !

    Ah il n'a pas fait le fier, le Heiho, dans la grande chute de la montagne russe couronnant le Tôkyô-dome. Ça monte, ça monte, ça s'arrête presque et... vraôôm ! Ça plonge vers le sol en laissant un sillage de hurlements. Ensuite ça tournicote, ça vrombit et ça repart pour un tour. Les camescopes et les appareils photographiques sont interdits et gardés au vestiaire, mais la photographie impayable des faces saisies de vertige est disponible à la sortie, moyennant une somme modique. Suppaiku est un grand fan. Heiho est un grand téméraire : « J'ai été un surhomme sur c't'affaire. Je me rendais même pas compte. J'ai crié beaucoup, très fort, longtemps. Pas dans la grosse-grosse descente, là les mots me manquaient. » Pour ma part, je suis resté bien tranquillement sur le sol ferme et horizontal à siroter une canette de café au lait sortie toute chaude du distributeur.

    « Ce que j'adore c'est les noeuds », dit Suppaiku, « Les nœuds d'autoroutes urbaines. Tu en as trois-quatre qui se superposent, avec un passage piéton au dessus. C'est étonnant. » Ce soir le temps est exceptionnellement doux. « Alors en fait, on est dans un quartier qui est entièrement moderne, et ce qui est marrant c'est que c'est un quartier moderne qui est coincé entre des quartiers très anciens. Là on arrive à Idabashi. Moi ce qui me fout la trouille à Tôkyô c'est pas que les immeubles se cassent la gueule, c'est les structures vitrées. Je pense que ça par contre, ça pétera. Quand tu regardes l'immeuble derrière... » Les fils ne sont pas enterrés à cause des séïsmes ? « Ils sont en train de les enterrer petit-à-petit. Là on voit, on est dans un quartier nouveau, c'est tout enterré. C'est très marrant quand on est dans une rue un peu ancienne où les fils sont enterrés parce que d'un seul coup on a un petit peu parfois l'impression d'être à Paris. Parce qu'il y a une densité de petits commerces qui n'existe pas en Angleterre. À Londres, ce qui manque c'est quand même le côté petit commerce dans la petite rue toute droite, etc. que par contre on retrouve à Tôkyô. Il y a un côté quartier. Alors à Idabashi, dans l'avenue Kagurazaka, il n'y a pas les fils, il y a un côté parisien. Dans la rue japonaise, normalement il y a les fils. » Là ça me rappelle mon quartier. « En fait on arrive dans le quartier français de Tôkyô. Il y a le lycée français, l'Institut franco-japonais, plusieurs écoles de français. On croise souvent des Français par ici, ou leurs femmes d'ailleurs, avec les enfants et les domestiques indonésiennes... On a un très beau ciel ce soir. On va acheter un onigiri, un truc comme ça » Nous entrons dans un konbini « Ici c'est la Sokka gakkai... », précise Suppaiku. On trouve un peu de tout dans un konbini, des onigiri bien sûr (« le seul truc qui soit mangeable »), des timbres pour les cartes postales, Madame Figaro en japonais... sur un fond permanent de musique de variétoche. « Quand on habite au Japon, la j-pop c'est une allergie totale. C'est tout le temps la même chanson. » Il y a un côté rétro dans leurs méthodes de vente et leur attitude d'acheteur. « C'est les années cinquante. C'est la stratégie du push. En fait tu vois, avec ton téléphone tu le passes comme ça, c'est la carte de crédit. Et tu as ça aussi, toujours le même système, tu passes le téléphone. Et tu peux le faire aussi avec le pass pour le train. Ce qu'ils ont trouvé là comme truc, c'est que dans ton téléphone tu mets toutes tes cartes. Et en fait c'est beaucoup mieux pour les banques, à mon avis tu ne comptes pas combien tu dépenses. C'est de l'argent invisible, ce que disait Baudrillard. Le plus marrant, c'est que tout le monde disait : "au Japon ça ne marchera pas, les gens aiment le cash". Mais tout le monde a un keitai. »

    « Vous savez où on est ? À votre avis, où construit-on un torii aussi grand que ça ? » C'est énorme... Yasukuni ? « Oui, on est à Yasukuni. » Ayons une pensée pour les valeureux héros du vrai Japon, ceux qui ont tenté de protéger l'Asie... « Les femmes surtout. » Qui leur en sont très reconnaissantes. « Ben oui, parce qu'en fait elles prenaient du plaisir. » Qui c'est le monsieur sur la colonne, là ? « Alors ça je ne sais pas. Ce que je sais c'est qu'une fois je suis tombé sur trois fafs européens qui le photographiaient et visiblement ils le trouvaient très intéressant. Quand je dis des fafs, ils parlaient une langue d'Europe centrale, ils étaient rasés derrière les oreilles, ils avaient l'air de trouver l'endroit très intéressant, ils photographiaient tout ce qui bouge. Je dois dire que pour ma part, même si je trouve que le sanctuaire en lui-même est un beau bâtiment, je n'ai jamais été spécialement un grand adepte des photographies du sanctuaire. En soit j'ai rien contre ce sanctuaire... » Nous lisons au pied de la colonne : Ômura Masujirô, ministre de la guerre (1824-1869). « Bon, lui c'est un ministre de la guerre ordinaire. Ce qui est plus inquiétant, c'est que cette année j'ai eu plusieurs élèves qui pour le nouvel an sont venus ici en kimono, etc. Dans les classes moyennes et moyennes sup', c'est un endroit à la mode... Alors aussi, autre caractéristique des sanctuaires et des temples, c'est que ça les gênent pas de mettre des parking. Bon, moi j'irais bien aux toilettes. »

    Et c'est ainsi que nous avons fini l'après-midi : en pissant à Yasukuni.

    À suivre...

  9. #99
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    Bonsoir, je n'ai pas vraiment de photo mais à part celle-ci


    Je dois une fois de plus remercier Suppaiku-kun, qui jouant avec mon coté sic TB <je fais pipi plus loin que toi> à réussi à me faire monter dans le Thunder Dolphins
    Il faut dire que je ne suis pas un fan des looping et autres manèges de ce genre, mais bon.



    Assis et arnaché (je vous passe les détails du "j'essaie de passer ma caméra en douce") tout ce passe bien puis ca démarre tranquille nous montons à de mémoire prés de 130 metres, déja là cacamou Suppaiku est mort de rire car il connait bien le truc ca doit etre ca quarantieme fois qu'il le prend, il se marre (en pensant à ce qui va m'arriver) moi aussi mais pas pour les même raisons ( pour moi c'est juste histoire de décompréssé) ca ralenti, on ne bouge presque plus et tout à coup plus rien, le vide, la peur absolu, une chute verticale de 80M ou malgré ma grande gueule je n'ai pas pu sortir un seul mot tellement j'avais la trouille, puis vint les looping les tortillons tete en haut, tete en bas !
    Le tout à durer, j'imagine, moins d'un minute mais quelle minute p'tain !!!

    Le Thunder Dolphin




    Bon sinon les chiottes du Yasukuni sont tip top

    Bon si on parlait bouffe pour changer hein ?

  10. #100
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    Il n'y en avait pas une de bonne parmi les photos que j'avais prises du balcon ?

    Pour la bouffe il y a « canette de café au lait », « onigiri » et tu as ajouté « cacamou » qui ne peut être sans rapport...
    __________

    La nuit est tombée sur Tôkyô comme la sauce soja sur les soba. Pareils à trois grains de riz perdus dans les boyaux de ce grand corps mégapolitain, nous nous mêlons à la circulation intestine. Nous croisons des livreurs de bols de nouilles en deux roues. Leur véhicule est équipé d'un porte-bagage suspendu afin de livrer le bouillon entouré par le bol plutôt que l'inverse. Je suis quand même épaté que ce dispositif fonctionne convenablement — peut-être conduisent-ils plus souplement que les livreurs de pizza parisiens ?

    « Alors moi je vais vous laisser, moi je vais rentrer en fait. Je commence tôt demain matin », nous précise Suppaiku. Mais voici notre rendez-vous du soir, ce modérateur portant de multiples fora à bout de bras, ce pilier qui est une clef de voûte du soubassement de ce site, dont le regard ténébreux et la face burinée imposent le respect à l'honnête homme et le silence aux trolls de tout poil. Sa réputation le précède partout où les larges épaules de sa main calleuse mettent les pieds ; l'éclat patiné de son étoile et de ses colts suffit presque à rendre les cons intelligents. Vous savez tous de qui je veux parler, il n'est pas même nécessaire de le nommer. (C'est CapRay.) « Je veux bien vous accompagner mais je ne vais pas dîner avec vous. J'ai une formation demain et j'ai des trucs à rendre. », nous informe Suppaiku. CapRay nous entraine jusqu'à son saloon préféré, Amakusa, un établissement en sous-sol tenu par un vieux couple, madame au service et monsieur aux fourneaux.

    Nous commençons par divers amuse-gueules dont du konnyaku, une gélatine végétale extraite d'une plante cousine de la pomme de terre, que son bilan calorique nul rend idéal pour les régimes (CapRay n'aime pas). C'est facile à faire d'après Suppaiku (dont je peux témoigner par ailleurs qu'il fait un excellent curry maison). Nos expat' s'accordent sur le fait que certains magasins de Ginza sont particulièrement bien fournis en vins français, et pour moins cher que les pinardiers d'chez nous (on parle bien des mêmes crus). La raison en serait que les grossistes japonais achètent très très en avance la production française (quinze ans), donc à un prix très avantageux. Pour ma part, je trouve significatif que des Français réunis autour d'une table se mettent aussitôt à échanger des plans bouffe. CapRay (fièrement) : « J'arrive même à trouver du Maroilles ! Je fais des tartes au Maroilles ici. » Suppaiku renchéri : « Je suis devenu copain avec un fromager à Matsuya. Un bon camembert, mais bien affiné : 1200 yens. » On nous apporte des oden (un peu comme du pot au feu, mais vécu plutôt comme un encas : légumes au bouillon, oeuf dur idem). Puis du poulet en friture karaage, puis des oeufs de poisson agglomérés comme nous en avions vu sur les marchés. Tous cela est arrosé de bière et de sake chaud, et d'un vin japonais peu mémorable mais dont l'étiquette s'orne du faciès réjouit de nos restaurateurs. Viennent des petits poissons koaji suivis de près par la mâchoire d'un gros (il y a une certaine logique là-dedans), laquelle s'avère tout à fait goûteuse et grasse. Il me semble qu'il y a eu des sashimi après.

    CapRay et Suppaiku entament un duo sur le civisme comparé des Nippons et des Françons : « Les Japonais ne sont pas plus civiques que nous dans l'âme. Ils ont peur de se faire remarquer. Les gens conduisent mal — j'ai vu des gens sur l'autoroute faire n'importe quoi — mais quand même globalement les feux rouges, les passages piétons, le code sont respectés. Il y a des fous du volant ici, mais beaucoup moins sur la quantité de conducteurs. Par contre ce sont de vrais fous. Les motos à 250 km/h aux carrefours... genre bôsôzoku. À Kyôto, il y avait un immense 4x4 avec une sono à donf' qui terrorisait les gens. C'était pas un truc d'extrême droite, c'était des jeunes mais c'était la même attitude. Les mecs d'extrême droite sont flippants ici. Samedi dernier c'était dans tout Tôkyô. À Ginza ils ont bloqué toute la journée le carrefour... gros camions noirs, drapeaux impériaux. Ça a été la guerre avec la police toute la journée, ils les ont chassés, ils sont revenus. J'ai remarqué que sur ces sujets là — avec les élèves de niveau avancés — les élèves se mettent à parler à voix basse. Il y a deux sujets sur lesquels les Japonais parlent à voix basse, ça et la Sokka Gakkai. C'est à la fois une très grosse puissance financière, une religion façon francs-maçons, et un parti politique. Une fois j'ai fait une blague sur les yakuza avec mes élèves. Oh la la, le coup de glaçon ! »

    En quête d'expériences inédites nous commandons un plat de sashimi de cheval. C'est assez proche du saucisson, gras et beaucoup moins fort de goût. Lové dans une baguette fraîche je suis sûr que cela fait un digne sandwich. Capray vente le fois gras de poisson (il n'y en a pas ici, conformément à l'usage français nous parlons à table de ce que nous avons mangé ailleurs). Ensuite nous boulotons des sazae (pauvre Sazae-san), et du foie... mais je ne sais plus de quoi. « Ça a un petit goût de foie », commente Heiho. Puis de la friture kiminago.... quel repas !

    CapRay et Suppaiku poursuivent leur analyse désinvolte de leur terre d'accueil : « Tout est fait ici pour maintenir dans une certaine enfance. Surtout les filles. Il y a beaucoup de femmes qui, au niveau du comportement, du vêtement, de la voix, entretiennent une situation d'enfance qui est vraiment ridicule. Les hommes aussi sont proches de l'enfance. Cela permet d'avoir de bons consommateurs, les gens sont très dociles. En France on se rebelle beaucoup plus. Chez nous on n'est pas enfant-roi globalement, les enfants en chient, il y a un système qui fait qu'on est derrière leur cul et qu'on les pousse. Ici ça peut être comme ça pour ceux qui vont aller à Tôdai, mais les autres non, ils sont bien. Les gamins font ce qu'ils veulent ici. Il n'y a aucune éducation : "tiens toi bien", "dis bonjour à la dame", non, on s'en fout. Les parents disent : "plus tard ils vont en chier, maintenant c'est leur enfance". Sauf ceux qui font des vrais cours du soir à fond. Tu sais qu'il y a des examens d'entrée dans certaines maternelles japonaises ? Si c'est une très bonne maternelle elle va conduire à une très bonne école primaire, à un très bon collège, etc. Tu es dans le cycle. C'est le système Tôdai, etc. »

    Nous revenons à un sujet plus sérieux : les courses de bouffe à Ginza. CapRay se plaint de ne pas trouver de bon cassoulet. Suppaiku vante le jambon à la coupe. On discute ferme sur le prix du foie gras. Il y a unanimité sur ce qui est infaisable au Japon : un petit-déjeuner en terrasse, avec un bon café et une baguette fraîche. Non que l'on ne puisse trouver dans la capitale les ingrédients nécessaires à la reproduction de cette scène ô combien française. L'obstacle, c'est qu'on ne les trouve pas avant dix heures du matin. On peut cependant boire d'excellents cafés, avec carte des arômes et la cafetière alambic en verre sur flamme d'alcool — un système français que l'on ne trouve plus que très rarement sur nos tables, hélas.

    Toujours concernés par l'intendance, nous passons au lavage. Suppaiku, encore fidèle au lav-o-matic, s'attaque courageusement à la pensée unique nippone en la matière, bientôt assisté par CapRay le démasqueur de tabou : « Je n'ai pas acheté de machine à laver parce que j'ai un problème existentiel avec les machines à laver. Est-ce que j'achète une machine tout en plastique à 16000 yens, ou est-ce que j'achète la coréenne à 70000 yens qui fait l'eau chaude, chargement frontal, tambour métallique, etc. C'en est une qui est en vente en France. C'est la seule qui chauffe ici. Même celles à 250000 yens à chargement frontal, les Panasonic avec micro ordinateur, etc. Elles ne chauffent toujours pas (ça sèche par contre). C'est un pays de contraste : ils sont complètement arriérés pour certains trucs et complètement en avance pour d'autres. Le Japon, sur plein de trucs, même quand ils ont tort, jusqu'au bout ils diront qu'ils ont raison. Moi, tous les Japonais que je connais, sur leurs machines à laver ils ont tous l'argument : "Chez nous l'eau n'est pas calcaire, donc le linge ne grisaille pas." Ils ont surtout un truc, ils ont leur femme qui est là et qui fera la lessive quotidiennement. C'est vrai qu'au Japon le linge est blanc... maintenant on va parler des cols. Tu abîme tes vêtements, ça fait des nœuds, mais surtout ça ne dégraisse pas. C'est con mais à 90° ça dégraisse, à 40° ça ne dégraisse pas. Quand on demande une machine à eau chaude on est regardé comme un martien. Dans un cours à trois ou quatre élèves, il y en avait une qui avait vécu en France, et justement on s'est retrouvés à parler des machines à laver. La fille qui avait vécu en France, elle a une machine française, donc à eau chaude... et vas-y que je te fais la snob : "oui mais moi je n'ai pas besoin des produits pour blanchir". En fait pour les Japonaises c'est un calvaire. C'est de la javel spéciale en spray qui mousse avec une espèce d'anti-tâche, que tu passes sur les cols, qui te brûle les doigts. En gros tu as les mains bouffées, tu es obligé d'en passer partout, tu es obligé de le faire reposer. Après tu es blanc. Les chemises sont bousillées très vite. Ils achètent du neuf souvent, pas cher. Les chaussures ici durent six mois, ça se décolle de partout, etc. »

    Notre plantureux repas ne s'arrête pas là, mais je vais laisser passer un entracte.

    À suivre...

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