Je reproduis une de mes chroniques...Il y a éventuellement des "spoilers" (?) :


Dans land of hope, l'auteur se positionne sur un certain onirisme dans sa mise en scène : les scènes rêvées ou fantastiques alternent les scènes réalistes. Cela m'a un peu gêné au début, notamment en raison de la gravité du sujet.


Ma grande interrogation a porté sur la nature de cette fiction : Pourquoi ne pas avoir tout simplement écrit son histoire directement sur Fukushima ? Cependant, après réflexion, cette méthode donne libre champ à l'auteur pour la forme qu'il veut donner à l'histoire et aux faits, lui permet d'éviter les polémiques sur la façon dont les évènements se sont passés.


De plus la fiction pour raconter la réalité comporte un méta-message :
- lorsque nous regardons un film catastrophe sur des évènements non avenus, nous fermons la télévision, sortons de la salle de cinéma après le "clap de fin" en se rassurant, "heureusement que dans la réalité cela ne peut arriver"...
- lorsque nous regardons un film basé sur des faits réels nous en sortons en nous disant également pour nous rassurer, "plus jamais ça".


Mais ici la fiction se place après la réalité en induisant une répétition : "fiction ? Oui. Mais cela est déjà arrivé. Voulez vous que cela arrive encore ?" Le film est un film engagé, protestataire et intelligent.


Quant à l'histoire, elle prend place après Fukushima : un nouvel "accident" nucléaire vient provoquer les même conséquences que le premier. Une ligne de démarcation absurde est placée, coupant un village en deux. Le film suit le destin de deux familles (2 parents, deux fils et leur compagne), chacune d'un côté et de l'autre du village. Si cette situation absurde paraît fictionnelle (et la réalisation entre onirisme et réalité appuie cette lecture), il n'en est rien : ces évènements sont vraiment arrivés et issus des recherches du réalisateur.



Le début du film m'a paru comporter une part de pathos, grande tentation de certaines fictions japonaises, ce qui peut nuire au message. Cependant, après en avoir discuté avec les personnes qui m'ont accompagné, ils n'ont pas eu le même ressenti.



Sur le fond, l'auteur écrit une parabole signifiante oscillant entre fatalisme et révolte :
d'une part, les citoyens locaux sont bien peu de chose face au pouvoir et aux médias, face à la voracité informe de la société de consommation qui nécessite toujours plus d'énergie.
d'autre part, l'homme a le choix de s'informer, être actif de sa propre vie et si sa région est condamnée, tenter de fuir (mais jusqu'où?).


Peu d'échappatoires pour les familles au final : les anciennes générations, enracinées, sont condamnées en même temps que la création des zones d'exclusion, tandis que les jeunes générations ne trouvent leur salut que dans la fuite.


S'il s'agit d'un film dur, l'oeuvre constitue pourtant un message d'espoir raisonné, notamment que l'on peut voir dans la scène où l'un des jeunes couples rencontre rencontre de curieux petits enfants assez philosophes :
"- 1,2,3. 1,2,3.
- Non ! Dorénavant les japonais ne marcherons que comme cela [lentement] : 1, 1, 1 , 1."


Prendre le temps de la raison dans sa vie et sa consommation. Prendre le temps de réfléchir (à renoncer au nucléaire).




En conclusion il s'agit d'un film salutaire qui engage la réflexion du spectateur.


*****
J'ai vu le film en avant première avec le réalisateur. Certaines questions ont été posées par des japonais et français.



"- Pourquoi avez vous choisi ce titre de land of hope ?
- Lorsque que nous n'avons pas de soucis, nous n'avons pas besoin du terme en question. C'est bien dans une situation de manque que nous nommons le terme d'espérance."