• Manga

    QU’EST-CE-QU’UN MANGA ?

    Il s'agit en fait d'une bande dessinée.

    Aujourd'hui, les personnages des mangas sont devenus complexes et des confusions sont possibles. Pour bien comprendre ces bandes dessinées, il est souvent nécessaire d’avoir une certaine connaissance de la société japonaise. Le Manga est un répertoire nouveau où se jouent des visions du monde, des valeurs éthiques. Une des réponses qui est apportée est souvent la fuite vers des univers galactiques. Les mangas puisent largement dans des faits universels, des problèmes de la société actuelle, des problèmes sexuels, affectifs, de scolarité, jusqu’à celui du monde des entreprises. On y trouvera donc les indices de la société codifiée, des problèmes générés par la vie moderne, la maladie du siècle et ses éventuels remèdes.

    AU JAPON :

    C’est un phénomène de culture populaire. La-bas, le Manga représente 1/3 du marché imprimé. Il a autant d’importance que le cinéma ou le roman. Cependant, Le Manga ne remplacera jamais le roman pour les Japonais qui lisent beaucoup.

    Le manga est lu dans la rue, dans le métro et certains cafés-restaurants proposent un choix important de mangas. Un mangaraku (..) est un magasin spécialisé en Mangas. Un japonais passe environ 20 minutes pour lire un manga de 320 pages (15 secondes par page).

    Au Mangakissa Café (surtout fréquenté par les hommes d’affaires), règne une ambiance studieuse, sans aucune gène par rapport aux thèmes traités dans le manga. La lecture d’un manga dans ce lieu coûte 15 FF les 30 minutes.

    L’image du manga est omniprésente à Tôkyô, car c'est une image qui va droit au but et que tout le monde peut comprendre. Il n’est pas utile de comprendre le texte en langue japonaise en raison de la facilité de sa structure. C’est un moyen d’évasion, à vivre en solitaire.

    Le coût d’un manga est de 15 à 40 FF, il est lu, puis jeté. Dans la gare de Shinjuku, un marché parallèle s’est établi : des mangas d’occasion abandonnés par les voyageurs sont revendus à bas prix.

    Il est imprimé sur papier recyclé, en noir et blanc sur environ 350 pages. La quantité de papier utilisée pour l’impression de mangas est supérieure à la quantité de papier toilette consommée au Japon. Quinze volumes sont consommés en un an par un habitant de l’Archipel.

    Une librairie utilise la moitié de sa surface en rayons mangas.

    La remise du prix Tezuka Awards est aussi un gros marché où se font connaître tous les mangaka (auteurs de mangas). Il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus. Cependant un mangaka reconnu est au Japon aussi célèbre qu’une star de Rock’n Roll.

    L’ORIGINE DU MANGA :

    Il est vraiment né dans l’après-guerre mais son origine semble remonter au 12ème siècle. En effet, durant la période d’Edo, les carnets de voyages des paysans représentaient des images de superstition. C’était réellement une histoire alliant le texte et les images.

    C’était l’ukiyo-e : estampe divertissante et facile à comprendre pour le plus grand nombre.

    Les mangas les plus connus sont Astro Boy, Dragon Ball, Robot Carnaval (animation); ils donnent lieu à des sous-produits comme des jeux, des dessins animés et des gadgets. Ce marché est important dans la mesure où 80 % des japonais ont une console de jeux. les hommes passent environ 3 heures par jour devant la télévision et les femmes cinq heures. Du coup, certains cinémas se sont spécialisés dans la projection de mangas.

    LES PERSONNAGES DU MANGA :

    Les yeux des personnages ne sont pas bridés et les paysages sont différents de ceux du Japon car c'est l’ailleurs et l’étranger qui suscitent le rêve. Les mangas diffusés en Europe sont beaucoup plus violents que ceux diffusés au Japon.

    Chez les jeunes :

    Il s’agit souvent de persécutions par leurs camarades d’adolescents faibles ou trop différents. Ces adolescents ne trouvent pas d’écoute auprès de leur famille ou de leur professeur. N’ayant pas d’issue à leur problème, ils finissent par se donner la mort. Les mangas de science-fiction sont robotisés à outrance (les samouraï perdurent à travers les robots), avec l’omniprésence de la technologie accentuant la puissance de la volonté et la pensée créatrice. Ces mangas font ressortir un pays où le sens du sacrifice, le conditionnement par la volonté et le stoïcisme sont les ultimes vertus de l’héroïsme.

    Chez les adultes :

    L’association de cultures étrangères permet de ne pas limiter le public au niveau de l’imagination. Le scénario est solide et les images sont réalistes.

    La femme apparaît sous plusieurs formes :

    - la femme-enfant (jeune fille idéale, souvent infantilisée);

    - la femme sexy ou mère guerrière.

    La violence et les préjugés jouent un rôle important. Toutefois, il semble que la violence des mangas n’ait aucune incidence sur les japonais (en effet au Japon on compte 1,4 meurtre pour 100 000 habitants contre 10,8 meurtres aux Etats-Unis pour 100 000 habitants). En revanche, toutes les 23 minutes-40 secondes, une personne se donne la mort (la tranche d’âge la moins touchée est celle des jeunes jusqu’à 19 ans, la plus touchée concerne les personnes de plus de 60 ans).

    Le manga serait-il donc un rêve sans conséquence ?

    A Takarazuka, le musée « Tezuka » est un lieu que tout Otaku (amoureux des mangas) ne peut ignorer.

    Ce musée porte le nom du créateur d'Astro Boy. Cet homme, médecin d’origine passa sa vie à dessiner. Ce musée est pour lui une manière de transmettre des valeurs aux enfants et au monde entier : préserver la terre et le pays (l’écologie est un thème souvent repris dans les mangas).

    Ce dessinateur, décédé il y a quelques années est un peu à lui seul Hergé et Disney réunis. Le roi Lion est né sous son crayon.

    L’humour dans les mangas :

    Les ruptures de tons, les non-sens, fondent l’humour japonais et les japonais rient souvent d’eux-mêmes. Les jeux de mots sont intraduisibles dans la langue française. Au Japon, il n’existe pas de livres de blagues comme en France, c’est un humour différent.

    LES ENTREPRISES QUI VIVENT DU MANGA :

    450 entreprises d’images animées se partagent le marché et emploient de jeunes diplômés. Le rôle de l’ordinateur est très important mais le dessin à la main n’a pas disparu. Le dessin est d’abord tracé sur papier, puis passé sur un cello, ensuite vient la préparation des fonds, enfin les images sont assemblées devant la caméra. Un long-métrage nécessite un an et demi de travail.

    A ce jour, les ventes de mangas diminuent d’un pour cent par an. Le manga semble avoir fait le tour de la question et les sociétés créatrices de mangas dépêchent leur personnel à l’étranger pour trouver du nouveau, renouveler le graphisme et offrir de l’exotisme.

    Propos recueillis lors de la soirée thématique « Manga » diffusée le 3 mars 1998 sur Arte.
    Remerciements à Christine Donato.