• Sans papier au Japon



    Les habitués du site sauront sûrement que je me suis marié il y à maintenant plus d’un an et demi, au Japon, et ce afin d'obtenir un visa pour y rester et y travailler. En effet, n'ayant pas plus d'affinités avec le mariage, que ce soit pour son côté romantique, social ou citoyen, cela ne nous dérangeait pas de se passer la bague au doigt, après plus de 3 ans vécus ensemble, si cela nous permettait de rester proche l'un de l'autre maintenant, mais aussi dans le futur. Mais voila, tout ne c'est pas vraiment passe aussi bien que prévu et le récit de la galère que j'ai connu pourrait peut-être en aider plus d’un, un jour.

    Le 25 novembre 2003, passage à la mairie de Hayama (Kanagawa-ken), tous les papiers en main, près à faire tamponner et valider l'acte de mariage. Ce fut chose faite en une heure. En même temps, sur les conseils du consulat Français, nous avons fait la demande pour avoir une carte de résident étranger et, ce que je pensais être, le nécessaire pour le visa. Une fois le passeport dans la main, on me dit de venir chercher le tout dans un mois. Je demande si tout était bon et si il fallait que je fasse quelque chose de plus pour obtenir mon visa, on me dit que non, que j'avais juste à revenir (ou ma femme) et que tout serait près et en règle. J'avais quand même un doute vu qu'entre temps, mon visa touristique arriverait à expiration, mais bon, j'ai été précis dans ma question et lui dans sa réponse. Un mois après, donc, ma femme va chercher les papiers et là, en dehors de la carte, rien... « heu et pour le visa ? » L'employer reste stoïque, il se renseigne, il n'a rien à dire à ce sujet, il n'est au courant de rien et ne sait même pas vers qui nous diriger. Résultat des courses, on appelle le bureau d'immigration a Tokyo, ils nous disent de venir, on est envoyé de bureau en bureau, pour finalement nous dire d'aller à Yokohama car j'habite Kanagawa-ken, on prend le train pour s'y rendre, on nous renvoie à un autre étage, on arrive trop tard pour l'entretien du matin, donc on va manger, on revient dans l'après-midi, on passe assez rapidement, rencontre avec un inspecteur de l'immigration qui nous explique qu'il est trop tard et que je suis en situation de dépassement de période du visa touristique et que je n'ai donc pas d'autre recours, si je veux rester au Japon, que de rentrer dans une procédure de régularisation qui prendra entre un an et un an et demi !

    Pendant cette période, je serais considéré comme résident illégal, je n'aurais donc aucun droit sur le sol Japonais (travail, etc..) et si je suis contrôlé par la police, c'est la déportation immédiate (ou presque) avec interdiction de mettre les pieds sur le territoire Japonais pour 5 ans (10 depuis quelques mois). Bref, pendant une heure, on a débattu et essayé de comprendre pourquoi c'était si long et surtout pourquoi on me disait que je n'avais pas le droit de travailler (légalement), mais que je pouvais le faire quand même si je voulais, mais aussi et surtout, pourquoi un simple contrôle des papiers pouvait être une raison suffisante pour me déporter ? N'y a t’il donc pas de communication entre les forces de polices et le bureau d’immigration, qui dépendent tous les deux du même ministère ? Au bout d'un moment, notre inspecteur a bifurqué avec un autre, un oyaji intarissable qui nous a relu le papier mot pour mot, deux fois et nous a fait comprendre que ça ne servait à rien de discuter !

    Mon premier réflexe a été de joindre l'Ambassade pour obtenir des renseignements et voir si il était possible d'obtenir une quelconque aide (sans parler du fait que j'y avais des contacts qui auraient peut-être pu m'appuyer), mais ça n'a rien donné. Malgré leur bonne volonté, ils n'avaient pas plus d'informations que celles que je possédaient et n'avaient jamais connu de cas comme celui-ci (depuis le changement de la loi). Mon autre problème, c'était le boulot, bien que je n'avais pas encore de visa me permettant de travailler, ma boite m'avait fait commencé un mois plus tôt en espérant que j'obtiendrait au plus vite mon visa d'époux. Malgré tout, mon patron aillant connu une situation similaire quelques années plus tôt, il comprenait la situation dans laquelle j'étais et à même fait en sorte que son avocat nous donne des conseils sur les démarches à suivre pour ne pas prendre de risques. En février, mon dossier complet était déposé, et là, commença la très très longue attente. Apres plusieurs mois, n'ayant pas de nouvelles (ils sont sensé mener leur enquête) nous avons appelés plusieurs fois, mais jamais de réponses, toujours le même refrain : "On vous rappelle dès que l'on a du nouveau." Résultat des courses, exactement un an après avoir déposé mon dossier, nous recevons un coup de fil du bureau d'immigration pour une première entrevue. Entre temps, rien, pas un mot, pas une trace de leur passage dans notre entourage. Ce n'est que la veille de l'entretien que ma belle famille a reçu un appel du bureau d'immigration, leur posant des questions banales sur moi et mon mariage. Le lendemain, même refrain pour moi et ma femme, séparés pendant l'entretien, des questions sur ma famille, la sienne, notre rencontre, etc... Apres 30 minutes, on nous remercie et on nous dit que l'on sera recontacté en temps et en heure. Problème, entre temps, mon passeport arrive à expiration. Passage au consulat, explications longues et ennuyeuses car il n'est pas possible de faire renouveler mon passeport depuis le Japon si je n'ai pas de visa japonais. Apres des négociations entre le bureau de Yokohama et le consulat, ce dernier a accepté ma demande en prenant le soin de joindre une explication sur ma situation, pour ne pas freiner le processus. Ce renouvellement ne semblait pas être un problème pour le bureau d'immigration. 3 mois après le premier entretien toujours aucune réponse, un petit coup de téléphone pour le principe, et là, on nous ressort le même discours, sauf que cette fois-ci, notre interlocuteur a l'air plus sympathique et a dit nous recontacter dès que possible. 2 semaines plus tard, il nous rappelle pour un nouveau rendez-vous, la semaine suivante, lundi à 9 heure.

    Ce jour la, il y avait beaucoup de monde à avoir rendez-vous comme nous, les noms ont été appelés les uns à la suite des autres et on leur a demandé de se rendre au 5eme étage, au bureau du ministère de la justice (c'est lui qui va délibérer et approuver ou refuser notre demande de régularisation). Encore quelques minutes d'attente avant que mon nom soit donné, on rentre, on s'installe, et là on me dit donc, que du fait de ma situation irrégulière je dois être déporte du Japon. Bien évidemment, je suis en droit de refuser, mais je dois alors expliquer quelles sont mes motivations pour rester, à l'oral et à l'écrit, en japonais ou en anglais, le tout après avoir revu avec l'inspecteur, mes données (adresse, nom, etc...). Une fois le papier rempli, signatures et hop, c'est reparti pour un tour, on nous rappellera dans une heure. Un heure plus tard, donc, un inspecteur sort du bureau avec plusieurs dossiers dans les mains il appelle les noms qui y figurent les uns après les autres, le mien en fait parti, une fois terminé, nous montons tous au 6ème étage, dans une sorte de salle de classe, l'inspecteur nous distribue alors des porte-documents contenant notre passeport et/ou notre carte de résident étranger, une feuille contenant des instructions en japonais, un feuille a remplir, et un petit papier format passeport avec notre photo, nom, etc... Il nous explique que ce papier est notre visa, pour un an à compter de ce jour et que les instructions qui lui sont attachées sont celles qu'il faut suivre pour les formalités telles que le "re-entry permit", la mise à jour de notre carte de résident étranger (dans mon cas, par exemple, il est écrit en gros et en rouge que je n'avais pas de visa). Sur ce, pour confirmer que nous avons bien pris connaissance des instructions que l'on a compris que la prochaine fois, toute infraction sera sévèrement sanctionnée par un renvoie immédiat, nous remplissons le dernier formulaire et c'est fini.

    Conclusion, il nous aura fallu attendre 17 mois avant que les autorités japonaises ne se décident à délibérer, en une heure de temps. Il y a comme un "hic" quelque part, mais nous n'y pouvons pas grand chose.

    Documents a fournir (dans mon cas, c’est suite a mon mariage, donc un(e) célibataire devra sûrement fournir d’autres papiers) :

    - Le document fourni par l’immigration, rempli (infos personnelles, motivations, explications sur le pourquoi de votre situation, etc…)
    - Le Koseki Tohon de votre couple (Fiche d’Etat Civil japonaise)
    - Juninhyo (Information sur votre lieu de résidence)
    - Informations sur votre emploi et celui de votre épouse/époux (Contrat, etc…)
    - Copies de votre passeport et de votre Carte de résident étranger
    - 3 photos format passeport
    - Et vos empreintes au moment de déposer le dossier complet

    Conseils
    :

    - Etre patient : Ca prend énormément de temps, on ne va pas beaucoup vous aider ou vous soutenir, donc prenez votre mal en patience et évitez de compter les jours.<BR>
    - Ne pas mentir : Tout leur dire, même et surtout si vous avez un emploi, tout mensonge peut coûter très cher.<BR>
    - Toujours les informer au plus vite du moindre changement : adresse, travail, passeport, vous devez absolument les tenir au courant de tout.<BR>
    - Eviter tout ce qui peut amener un contrôle d'identité : Rouler en vélo sans lumière la nuit, etc... (J'ai lu le cas d'un sans papiers qui s'est fait déporté à cause de ça)<BR>
    - Garder le moral : C'est long et difficile, mais il ne faut pas pour autant se dire que tout est fini. J'ai vécu plus d'un an, tout a fait normalement, malgré le fait que je n'avais pas visa.