• Icho



    Réputé pour son feuillage doré à l'automne, le Ginkgo biloba« l’arbre aux quarante écus » est un véritable fossile vivant qui fut l’objet de l’admiration de nombreux peuples asiatiques, tant pour sa beauté que pour ses vertues thérapeutiques.

    Introduction

    Son nom de genre (Ginkgo) vient de deux mots chinois signifiant "abricot d'argent", allusion à la couleur de ses pseudos fruits. Le nom d'espèce, (biloba) "à deux lobes" vient du profond sillon qui divise ses feuilles. Mais les feuilles sont souvent découpées en plus de deux lobes ; aussi les Chinois et les Japonais les ont surnommées familièrement "pied de canard"... Certains disent que son nom populaire vient du prix que son premier acheteur l'aurait payé en fait ce nom évoque simplement les couleurs dorées des feuilles en automne. Qu'il est un survivant archaïque de l'ère des dinosaures, n'aurait absolument pas souffert lors de l'explosion nucléaire d'Hiroshima (ou de Nagasaki selon les sites, voire de Tchernobyl) et serait un des arbres les plus résistants qui soit à la pollution, ainsi qu'au feu puisqu'un temple de Tokyo aurait été protégé par ces arbres lors de l'incendie ayant suivi le tremblement de terre de 1923.


    Je vais tenter de vous en apprendre plus a son sujet :



    Histoire

    Les premiers fossiles de membres de la classe des Ginkgopsidés ont été trouvés dans des roches du Primaire (Carbonifère récent), datant de 310 millions d'années. Ces pré-conifères partageaient le globe avec les fougères géantes. Loin d'être archaïques, ces plantes étaient des génies précoces puisqu'elles avaient inventé la graine, ou presque et ne dépendaient plus de l'humidité atmosphérique pour leur fécondation.
    Pas de dinosaures à cette époque, mais des amphibiens géants et des reptiles mammaliens, géants également, nos lointains ancêtres. A la fin du Permien, il y a 245 millions d'années des gigantesques éruptions volcaniques en Sibérie font changer le climat et mourir les plantes, le climat est bouleversé et les mers reculent. Près de 90% des espèces animales terrestres ou marines disparaissent durant cette crise.La vie repart à la conquête du monde à l'ère secondaire, mais des familles anciennement florissantes ont disparu ou ont cédé la prééminence à des nouveaux riches : les petits mammifères, descendants des mammaliens ne subsistent que dans les biotopes délaissés par les dinosaures. Les ginkgos occupent les zones tempérées froides, en compétition avec les vrais conifères dotés de vraies graines. Au Crétacé, voici 130 millions d'années, les Angiospermes, les plantes à fleur, apparaissent et concurrencent les Gymnospermes.Une nouvelle catastrophe, la chute d'une météorite, plonge la terre dans un long hiver il y a 65 millions d'années. Les dinosaures s'éteignent et 80% des espèces vivantes, ce qui est la chance des mammifères. Les changements climatiques affectent la classe des ginkgopsidés : seul le Ginkgo biloba survivra dans un monde désormais largement dominé par les plantes à fleurs.Le quaternaire récent (Pliocène, 5 millions d'années) a été marqué par un net refroidissement du climat et par des avancées de la banquise sur toute l'Europe. Les plantes les plus fragiles se sont réfugiées vers l'Équateur. Malheureusement, les chaîne montagneuses européennes sont orientés Est Ouest et ont donc constitué un barrage absolu : les ginkgos, les séquoias disparurent. En Asie et en Amérique du Nord, le reflux vers le Sud ne fut pas entravé par des montagnes et les extinctions furent moins nombreuses.



    Après les grandes glaciations du quaternaire, les quelques Ginkgos survivants occupaient un petit territoire dans le Sud-est de la Chine.. Le ginkgo ne fut introduit au Japon et en Corée qu'au XIIème siècle par les moines bouddhistes ayant séjourné en Chine. Le Ginkgo devint alors un arbre mythique encore aujourd'hui très vénéré dans toute l'Asie. Cependant, il n’est pas certain que le Ginkgo existe toujours à l’état sauvage en Chine. Les derniers Ginkgos sauvages se développeraient spontanément dans deux petites zones montagneuses à la frontière entre les provinces de Zhejiang et d'Anhwei (Tian Mu Shan), en Chine centrale, et en Chine occidentale dans les provinces de Guizhou et de Sichuan. Ces observations ( années 30 ) n'ont cependant jamais été authentifiés depuis par des témoignages récents et irrécusables. En Asie, le bois de ginkgo fut souvent utilisé dans l'architecture, la menuiserie et le mobilier, mais aussi les ustensiles, l'artisanat ou les instruments de musique. Le ginkgo fut d'abord employé dans la construction des temples qui ont longtemps eu le privilège impérial de pouvoir cultiver ces arbres sacrés. Le mobilier rituel de ces édifices était parfois également réalisé en ginkgo. Les moines du Tibet attribuaient aux décoctions tirées des feuilles de ginkgo la même puissance magique qu'avait l'infusion de thé: maintenir l'esprit en éveil lors des longues séances nocturnes de méditation.
    Les moines chinois plantèrent des spécimens dans leurs temples. Le botaniste et médecin allemand Kaempfer fut le premier occidental à décrire l'arbre aux quarante écus, d'après des spécimens qu'il admira au Japon au 17ème siècle. Rapporté par les moines bouddhistes ayant séjourné en Chine ou en Corée, le Ginkgo fait probablement sa première apparition au Japon au XIIème siècle. Le Ginkgo devient alors rapidement un arbre sacré des temples shintoïstes. Ainsi, sur les 1600 arbres géants classés monuments naturels au Japon, les ginkgos représentent plus d' un 1/4 des arbres protégés.


    Le Japon s'étant fermé aux étrangers, à part les agents de la compagnie commerciale hollandaise parqués en rade de Nagasaki, les botanistes anglais s'intéressèrent à cet arbre d'or en Chine : ils réintroduisirent le ginkgo dans son ancien habitat européen en 1727, puis ce dernier gagna les jardins du monde entier, ce qui le sauva ... jusqu'à la prochaine extinction de masse...

    Etymologie

    Il aura fallu plusieurs siècles pour que l’orthographe du nom de cet arbre soit enfin fixée. Au Japon, comme l'a écrit Kaempfer en 1720, l'arbre est appelé ichô ou ginnan, ce qui signifie " arbre aux abricots d'argent". Cela fait référence aux reflets argentés des fruits qui ont la taille et la couleur de ceux de l'abricotier. Ginnan est une des deux transcriptions japonaises normales pour les idéogrammes chinois signifiant " abricots d'argent" et lus actuellement yinxing. Une autre transcription est gin kyo .C’est sans doute grâce à une faute de transcription que le gin kyo japonais deviendra le Ginkgo en Europe. L’auteur de cette erreur ? Engelbert Kaëmpfer, le « découvreur » allemand (1651-1715) de l’arbre, qui aurait mal formé un Y qui fut pris pour un G, soit par lui-même, soit par son imprimeur!


    Autres appellations japonaises

    Ginkgo, nom actuel de notre arbre, signifiant " abricot d'argent", est actuellement tombé en désuétude au Japon. Guinnan, autre nom japonais signifiant " abricot d'argent", est encore populaire au Japon mais il désigne les amandes du Ginkgo plutôt que l'arbre lui-même. L'appellation courante de cet arbre au Japon est itsjo ( prononcer itchô ). Ce nom vient du chinois Ya-Tchio, littéralement « patte de canard », en référence à la structure palmée de la feuille bilobée. La transcription actuelle du nom japonais est Ichô ou Ichou. Il existe d'autres appellations japonaises, notamment l' arbre aux mamelles, chichi-no-ki. ce nom est encore utilisé dans les temples de campagne qui abritent de vieux Ginkgos et où les superstitions populaires relatives à l'allaitement des enfants sont encore vivantes.

    Le nom d’ arbre aux quarante écus n’est employé qu’en français. Il date de 1780 et on le doit à Pétigny, botaniste français amateur, qui acheta en Angleterre les cinq premiers arbres ramenés en France. En calculant le prix de son achat par rapport à celui du repas qu'il offrit à son fournisseur, Pétigny surnomma ses arbustes " arbres aux quarante écus". Selon une autre version des faits, le botaniste anglais aurait proposé le lendemain de reprendre pour ce prix-là un seul des plants parmi les cinq qu'il avait vendus la veille. Presque tous les Ginkgos de France descendent de ces cinq plants importés d'Angleterre par Pétigny. Le nom d'arbre aux quarante écus rappelle également que les feuilles, en automne, peuvent faire penser à des écus en or !
    Le nom de " noyer du japon", actuellement aussi en désuétude, vient de la ressemblance approximative de ce qu'on appelle les "fruits" du Ginkgo, contenant une amande comestible, avec les noix.

    Botanique

    Le Ginkgo biloba est un arbre appartenant aux Gymnospermes, étymologiquement "plantes à graines nues", surtout représentés de nos jour par les pins, sapins... L'espèce est dioique, c'est à dire qu'il existe des spécimens mâles et des spécimens femelles, séparés.


    Les Gymnospermes ne libèrent pas de spores comme les fougères datant de la même époque. L'équivalent du prothalle germe sur la plante mère, bien protégé dans un ovule. La fécondation par des gamètes mâles contenus dans le pollen donne naissance à une graine, souvent protégée dans un fruit, qui permet la dissémination loin de la plante mère.
    Les ginkgo mâles ont des spermatozoïdes ciliés qui nagent dans une petite goutte de liquide sécrétée par les ovules riches en réserves nutritives des pieds femelles. En fait, il y a deux ovules sur chaque rameau reproducteur, mais un seul arrive à maturité. Les conifères plus récents n'ont plus de spermatozoïde, mais un tube de pollinisation. Très abondants en automne, poussant souvent en grappe, les ovules du ginkgo font penser à de petits abricots. Ils demeurent sur l’arbre après la chute des feuilles, ce qui le rend très décoratif en fin d’année. Ce sont des pseudo-fruits car ils naissent sur l’arbre indépendamment de la présence d’un ginkgo mâle et sans fécondation par le pollen. Il s’agit d’une organisation complexe contenant des réserves alimentaires pour le futur embryon. Ces « fruits » sont formés d’une partie charnue, d'un noyau enfermant une amande et d’une série de membrane protectrice.
    Ce fruit n’est pas comestible, il est même toxique. Une fois au sol, la chair de ces fruits se décompose, produisant une odeur forte, persistante et désagréable. Elle laisse peu à peu apparaître le noyau qui s’est formé et contient une amande comestible. Le noyau du ginkgo ressemble à une grosse pistache, blanche et brillante. Les seules amandes qui se conservent sont celles qui ne sont pas fécondées.
    Les pieds mâles jaunissent et perdent leurs feuilles une quinzaine de jours avant les pieds femelles. Il est difficile de distinguer les Ginkgo par leur sexe, excepté en automne lorsque les ginkgos femelle portent leurs fruits. Toutefois, lorsque des ginkgos de sexes différents poussent sur un même site ,on peut les différencier en constatant un décalage dans l’évolution saisonnière du feuillage et des inflorescences. Chez les ginkgos males, au printemps, l’arrivée des feuilles, puis celles des inflorescences, précède d’une quinzaine de jours celle des ginkgos femelles du voisinages. En automne, c’est la chute des feuilles des ginkgos males qui précède celle des ginkgos femelles ? Ce curieux phénomène peut se constater notamment au jardin des plantes de Paris, devant la salle de paléontologie du Museum d’Histoire Naturelle, où se trouve un ginkgo de sexe masculin. On lui a greffé au siècle dernier une branche de ginkgo femelle. A chaque saison, sur cet arbre devenu bisexué par le fait de l’homme, on peut constater ce curieux décalage. Les feuilles du Ginkgo peuvent rester sur l’arbre tard dans la saison pour finir par tomber parfois brutalement, en quelques jours, voir même en un seul jour en 1 ou 2 heures !
    Au japon, on aime dire aux enfants, en plaisantant, que les feuilles sans échancrures, en forme de jupe, sont celles des arbres femelles, tandis que les feuilles bilobées, ayant la forme d’une culotte courte, sont celles des arbres mâles.
    Les chichi sont de curieuses excroissances pendent comme des stalactites, et peuvent même aller jusqu'à s’enraciner. Leur nature réelle n’est pas connue.


    Les branches sont dimorphes. Les rameaux longs et les rameaux courts poussent à angle droit. Les rameaux longs (auxiblastes) ont une croissance rapide. Leurs feuilles, à disposition spiralée, sont espacées. Les rameaux courts latéraux (mésoblastes), à croissance très lente, sont densément feuillés (jusqu’à 10 à 15 feuilles) et portent les inflorescences. Les bourgeons poussent sur les rameaux courts et longs, mais aussi sur les branches, et même sur le tronc, qui est encore une particularité du Ginkgo. L' écorce du Ginkgo a la particularité de présenter des cristaux d'oxalate de calcium.

    Le Ginkgo au Japon

    Tokyo
    On rencontre de très nombreux Ginkgos dans les parcs et le long des avenues de Tokyo. La ville compte environ 65000 Ginkgos, soit 16% des arbres d'ornement des espaces publics de la ville. La feuille de Ginkgo est l'emblème de la ville de Tokyo. Les Ginkgos les plus célèbres de la capitale sont plantés le long de l'allée d'honneur de l'Université de Tokyo. On dit au Japon qu'il faut ramasser une feuille de ces Ginkgos à la naissance d'un enfant pour qu'il ait un jour la chance d'intégrer l'université la plus cotée du pays.

    Jardin botanique Koishikawa: arbre femelle qui permit à Sakugaro Hirase de découvrir, en 1895, la fécondation des embryons dans les ovules de Ginkgo tombés à terre plusieurs mois après leur pollonisation.

    Le Ginkgo biloba d’Hiroshima
    Le 6 août 1945, les américains lachèrent leur bombe atomique Hiroshima. Toute la végétation présente autour de la zone de l'épicentre fut examinée en septembre 1945. Un Ginkgo, situé devant un temple à environ un kilomètre de l’épicentre, semble avoir été le premier arbre à bourgeonner lors du printemps 1946 ( le temple lui-même ayant été détruit ). Ce Ginkgo, symbole de vie et de renouveau, fut intégré dans l'escalier d'accès lors de la reconstruction du temple ( l'escalier se présente sous forme d'un U, protégeant le Ginkgo ). Depuis, de nombreuses études ont montré que le Ginkgo présente une grande résistance aux agents mutagènes, comme les radiations.


    Kyoto
    Vieux Ginkgos devant les Temples Nishi-Honganji et Higashi-Honganji

    Sandaï
    Le Ginkgo sacré, âgé de 600 ans, est considéré comme le plus grand du pays. Ses branches couvrent une superficie au sol de 250 m2, son tronc multiple mesure plus de 8 m de circonférence, ses excroissances dépassent 3 m de haut.

    Osaka
    Le logo de l'Université est une feuille de Ginkgo

    Hokkaido
    Hokkaido University, Ginkgo Avenue avenue de 400m avec 70 arbres, ave un arbre de 36 m et 1300 ans, ginkgo femelle le plus large ( 12 m ) du Japon

    Cuisine

    L'amande du fruit du ginkgo, grillée ou bouillie, est très appréciée en Asie, surtout en Thaïlande. Elle accompagne et parfume les plats les plus raffinés de l'Extrême-Orient, notamment ceux des fêtes et des célébrations. La consistance de l'amande est croquante. Son goût n'est pas très prononcé, il peut rappeler celui du pignon de pin. L'amande se consomme entière, en amuse-gueule, dans les soupes ou les plats à la vapeur. On la préfère parfois moulue ou encore pilée. En Chine, on offrait les graines de ginkgo teintes en rouge, couleur de la joie, lors des naissances et des mariages.

    Pharmacie

    Pour terminer sur les ginkgo, nous pourrions évoquer la figure de Theophrast Bombast von Hohenheim. Ce chirurgien, géologue, astronome et alchimiste suisse de la Renaissance, plus connu sous le pseudonyme de Paracelse, considérait que la santé de l'homme était en harmonie avec la nature. Des plantes de marais devaient soigner les fièvres. Ce n'est pas tout à fait une calembredaine, puisque Paracelse soignait ces affections avec des écorces de saule, arbre des lieux humides qui contient comme chacun sait de l'acide salicylique, composant de base de l'aspirine.
    La théorie des signatures voulait également que la Providence ait donné aux plantes médicinales un aspect rappelant les maladies qu'elles sont censées soigner. C'est souvent complètement infondé : les graines de luzerne en forme de corne de béliers n'ont jamais guéri les fractures causées par les ruminants irascibles.
    En revanche, la science moderne a découvert les vertus toniques des extraits de feuilles bilobées du ginkgo.

    Au niveau circulatoire :
    Stimule et tonifie la circulation sanguine, en particulier dans les zones de microcirculation, grâce à l'action vitaminique P des flavonoïdes.
    Améliore les propriétés de viscoélasticité du sang
    Inhibe le facteur de coagulation des plaquettes sanguines, une réaction présente dans une inflammation allergique ( notamment l'asthme ) ou un choc anaphyllactique.

    Au niveau cerebral
    :
    Améliore le métabolisme du glucose cérébrale
    Inhibe le développement de l'oedème cérébral toxique ou traumatique
    Protège le cerveau grâce à ses ginkgolides A et B et à la bilobalide

    Autres propriétés :
    Inactive les radicaux libres grâce à ses flavonoïdes ( antioxydants )
    Réduit l'oedème de la rétine et les lésions cellulaires de cette dernière
    A des effets anti-inflammatoires, combat les allergies
    Agit comme un antispasmodique
    En Homéopathie: Amygdalite gauche de 4 à 6 CH, Céphalée gauche de 5 à 9 CH et Crampe des écrivains de 5 à 9 CH


    Il existe de nombreux produits de beauté contenant des extraits de Ginkgo biloba (EGb), notamment des crèmes hydratantes, c'est à dire des des émulsions pour apaiser et protéger les peaux fragiles et sèches. Depuis peu, on voit apparaître sur le marché des sérums à haute concentration présentés comme soins anti-âge. De plus l'acide contenu dans l'EGb aurait une certaine efficacité sur les taches de vieillesse.