• Le Japon à l'aube de l'ère du poker

    Si le Japon est à la pointe dans de nombreux domaines et créé des tendances reprises à l’échelle planétaire. Le phénomène du Texas Hold’em n’avait jusqu’à récemment pas atteint l’archipel. La législation des jeux d’argent en est sûrement la cause principale. En effet, seul le poker de divertissement (Amusement Poker) était pratiqué au pays du Soleil Levant et permettait de remporter de menus lots. Dès 2008, les Japonais ont pu avoir accès au poker en ligne, mais il n’a pas suscité un grand intérêt dans le pays. Mais ça… c’était avant le 20 juin 2012 !


    Car 2012 peut être vue comme l’année charnière pour le « vrai » poker au Japon. Naoya Kihara, 30 ans, est en effet devenu le premier Japonais de l’histoire à avoir remporté un mythique bracelet du World Series Of Poker (WSOP) depuis la création de ce tournoi, il y a près de 43 ans. Enseignant de métier, Naoya a découvert le poker en ligne quatre ans auparavant, grâce à l’un de ses amis et a fait ses débuts sous le pseudo de « Nkenyo ». Après des tournois en ligne, qui lui ont rapporté quelques milliers de dollars, il s’est essayé aux vrais tapis verts. Bien lui en a pris, puisque de la 653ème place au Maint Event du WSOP 2011, il a finalement terminé premier du WSOP 2012, avec à la clef plus d’un demi-million de dollars (41 millions de yens). Propulsé sur le devant de la scène, sollicité par de nombreux médias japonais, Naoya déclare avoir eu beaucoup de chance. Il veut surtout profiter de sa notoriété pour devenir l’ambassadeur du poker dans son pays. Mais pour l’instant ce n’est pas ce qui intéresse le plus les médias : ceux-ci veulent savoir comment Naoya va dépenser ses gains… Alors quand il explique que cet argent va essentiellement servir à financer ses prochains tournois, ses compatriotes restent perplexes.

    L’ambition de Naoya est de changer l’image que ses compatriotes ont de ce jeu de cartes et il profite de chacun de ses nombreux passages à la télévision pour tenter de les convaincre que ce jeu n’est pas régi uniquement par le hasard. En effet, la plupart des Japonais ne considèrent pas le poker comme un jeu d’adresse, nécessitant des compétences pointues et une préparation sérieuse. Même si le poker lui permet de vivre, Naoya a réalisé son rêve de devenir un joueur sponsorisé, puisqu’il a intégré la team PokerStars. Curieusement, les moins enthousiastes sont sans doute ses propres parents qui « n’aiment pas ce qu’il fait » depuis qu’il est passé professionnel. Si les amateurs de mah-jong et de backgammon sont nombreux, les jeux d’argent et de hasard restent souvent associés aux Yakuza.

    Naoya, ainsi que d’autres amateurs de poker en ligne, sont d’ailleurs nombreux à penser que le Japon va rapidement se découvrir d’autres champions et que le bracelet WSOP 2012 n’est que le premier d’une grande série ! Ils s’attendent aussi à un changement imminent dans la politique de leur gouvernement concernant les jeux d’argent : d’après eux, les dirigeants savent qu’ils pourraient récolter d’énormes sommes d’argent en légalisant puis en taxant les établissements de jeux en dur et les jeux sur Internet. Et si cette légalisation devenait réalité, nul doute que le vrai poker deviendrait encore plus populaire que l’amusement poker...

    La victoire de Naoya n’est donc pas qu’une victoire personnelle. A plus grande échelle, ce titre WSOP pourrait être l’étincelle qui provoquera le boom du poker dans ce pays. Un petit pas pour Naoya Kihara, un grand pas pour le Japon dans le monde du poker…