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watanabe
06/05/2006, 16h31
Bonjour,

En cherchant des informations sur la couleur rouge au Japon, j'ai trouvé cet article sous forme de questions/réponses sur les Haniwa.


Commissaires
Les Haniwa
KARAKAWA Shirō : Conservateur au Musée d’Histoire de Gunma - Japon


Entretien. Les Haniwa, "Gardiens d'Eternité" sont des figures en céramique datant des IIIe au VIe siècles, emblématiques de la période dite Kofun et reposant sur ces tertres funéraires qui parsèment le Japon.


ArtsLivres : Le Nihon Shoki [1] au VIIIe siècle mentionne les Haniwa : que savait-on d’eux avant les recherches modernes ? Vu l’engouement chinois pour les bronzes Shang, les Haniwa furent-ils collectionnés ?

KARAKAWA Shirō : Oui. Des gens s’y sont intéressés dès l’époque Edo, mais sans faire de recherches à leur sujet. En fait, on n’avait pas bien conscience des Kofun, ces tertres funéraires sur lesquels on posait les Haniwa. Ils étaient alors plutôt considérés comme des collines au sommet desquelles on pouvait trouver des objets d’argile. A l’ère Meiji en revanche, des archéologues comme Siebolt, Edward Morse et Ernest Satō commencèrent les premières recherches au Japon. Aujourd’hui, on divise les Haniwa entre objets d’art proprement dits, et objets de recherche, mais on ignore généralement l’état originel et le lieu de provenance des Haniwa entrés dans les collections aux siècles passés. Ainsi retirés de leur contexte, ils ont beaucoup perdu de leur valeur archéologique.

Les Haniwa sont réputés fabriqués par la technique du colombin. Etait-ce la seule ?

Non, mais c’est la principale, le tour n’était pas utilisé. Mais pour les Haniwa anthropomorphes, bras et détails étaient façonnés par adjonction de bouts d’argile. Le porteur de bouclier a bien un corps fait dans un cylindre d’argile, mais le bouclier fut ajouté en un deuxième temps.

Le Nihon-Shoki parle de mâts ou de piliers en bois, aux abords des grands tertres sur lesquels, croit-on, étaient disposés les Haniwa dans une mise en scène cultuelle, avant d’être portés au sommet des Kofun.

On a effectivement retrouvé les vestiges de quatre piliers en bois, dont on imagine qu’ils auraient servi à soutenir une terrasse rectangulaire et latérale, en saillie à même le flanc du tertre ( uniquement pour les Kofun en forme de trou de serrure ) où auraient eu lieu les cérémonies.

Mais la forme de ces tertres a varié selon les siècles : ainsi au IVe siècle la partie circulaire arrière était bien plus élevée que la partie trapézoïdale avant, au Ve siècle cette dernière augmenta en hauteur sans jamais atteindre la partie postérieure, et au VIe siècle les deux parties avaient sensiblement la même hauteur. Ainsi la signification sacrée de la partie trapézoïdale perdit-elle son sens vers le VIe siècle. En outre, pour la partie circulaire aux IVe et Ve siècles, il existe un puits d’accès vertical condamné après l’enterrement du défunt, alors qu’au VIe siècle, les tertres étant plus hauts, l’accès à la chambre funéraire se faisait directement par un tunnel.

Depuis quand font-ils l’objet de recherches scientifiques au Japon ?

Depuis l’époque Edo (1604 –1868), mais cela s’intensifia ensuite, en partie sous l’influence de l’archéologie occidentale. La dernière grande découverte fut celle des objets en bois, c’est le dernier grand virage archéologique. Dans le département de Nara, on a récemment découvert le Kofun de Shijun, une découverte tardive car il était immergé sous les rizières.

Les Kofun des empereurs ne sont toujours pas explorés, n’est-ce pas ?

Oui, mais cela ne concerne que les Kofun impériaux des membres de la lignée impériale. Ils ne sont par considérés tel un bien culturel, mais comme une tombe privée : c’est à ce titre que les fouilles sont interdites. Mais quand les tertres impériaux nécessitent des travaux de restauration, le Bureau de la Maison Impériale autorise des travaux de réaménagement, mais ils restent limités.

Vu l’immense tertre antérieur du premier empereur chinois Qin Shi Huangdi au 3e siècle AE, est-il possible que l’idée de construire les tertres japonais soient venus du continent ?

Non, c’est très différent. Ensuite, certains sont orientés vers un point précis (montagne), mais cela varie selon les régions. Des chercheurs y voient des règles, mais ce ne sont encore qu’hypothèses.

Les Haniwa portent des traces de peinture rouge. Pourquoi cette couleur en particulier ?

L’hypothèse est que le rouge est la couleur de la vie, d’où son omniprésence, car les Haniwa n’étaient pas les seuls : c’est aussi le cas des parois en pierre des chambres funéraires, ainsi que des ossements. Les Haniwa avaient aussi du noir, qui se conserve mal. Et le choix des couleurs dépendait de l’objet représenté, comme pour les boucliers en cuir ou en bois. Les personnages avaient aussi leurs traits peints en rouge, représentant peut-être un maquillage cérémoniel… Pour les pigments, le blanc était tiré de l’argile, le rouge du fer (Fe3+), et le noir du manganèse.

D’où venait l’argile utilisée pour les Haniwa ?

Il faut distinguer deux époques. La première (IVe–Ve siècles) est celle des Haniwa cylindriques, cuits dans de petits fours voisins, si bien que chaque lieu avait son propre style. Par contre, le VIe siècle vit des regroupements de potiers spécialisés, dont la production quelque peu centralisée partait ensuite vers des sites différents. Mais l’argile était local, au maximum d’une aire équivalent à un département japonais actuel. Car à l’époque, chaque souverain avait son domaine, centré sur une rivière pourvoyeuse d’argile pour les Haniwa du lieu. D’où une différentiation stylistique, et chimique, d’autant qu’à l’époque, l’eau était primordiale pour la riziculture : qui détenait l’eau avait le pouvoir.

Hormis la typologie thématique, y a-t-il une typologie géographique des Haniwa, de Kyushû au Kantō ?

Pas vraiment. Les différences sont surtout sur la thématique : anthropomorphe, zoomorphe, etc. Les oiseaux sont les plus anciens et les plus représentatifs, les Haniwa anthropomorphes n’étant apparus qu’après. Cela dit, à Kyushû et uniquement là-bas, on trouve des sculptures : chevaux de pierre ( sekiba ), hommes ( sekijin ) et boucliers. Dans le Kinai [2], on a aussi trouvé des objets en bois ( mokuseihin ), qui sont des Haniwa mais dont il reste peu d’exemples vu la putrécibilité du bois. Certes, si le terme de Haniwa désigne d’abord une terre rouge, il faut le comprendre comme un ensemble d’objets ayant une même fonction, quel que soit le matériau utilisé, et la moitié des chercheurs et archéologues actuels concourent. Le problème est historique : la compartimentation des découvertes archéologiques selon le support utilisé donna lieu à des dénominations différentes, sans que l’on se posât la question de leur rōle. Pour moi, ils sont équivalents, même si les Haniwa en argile sont de loin les plus nombreux.

Quelle est la fragilité de conservation de ces pièces vieilles de quinze siècles ?

Elles sont fragiles et aisément cassables. Leur production à l’origine était décorative, et nul ne pouvait imaginer alors qu’ils seraient conservés à l’avenir. Pour tout vous dire, les Haniwa sont bien les derniers objets que les conservateurs consentent à toucher.

Outre le Musée de Tōkyō, quels musées conseilleriez-vous au Japon ?

Au nord du pays, le Musée d’Histoire de Sendai, le Musée National de Kyōto, le Musée de Nara pour ceux s’intéressant au bouddhisme, le Musée d’Histoire de Fukuoka à Kyushû, et bien sûr, le Musée d’Histoire de Gunma.

Propos recueillis en 2002 en traduction simultanée assurée par HIMEDA Mihoko et Philippe ACKERMANN, à l’occasion de l’exposition Haniwa à la Maison de la Culture du Japon à Paris ( Pari Nihon Bunka Kaikan )


Bonne journée à vous tous.

TB
06/05/2006, 20h49
Très intéressant, merci.

asagiri
07/05/2006, 10h55
bonjour

ha oui ,c`est une periode de l`antiquite japonaise tres interessante
la region de Gunma est tres riche en kofun contenant des Haniwa
le livre tres complet du Professeur Suenaga Masao (Haniwa dokuhonHaniwa DokuhonISBN: 4639006527)est une des references (en japonais c`est ma punition de mauvais eleve, :lol: )
par contre on ne trouve pas de kofun dans l`ile de Hokkaido

merci Watanabe san de cet excellent post