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Afficher la version complète : Mentalité Les Japonais font-ils grève ?



MeTaTrO
02/02/2005, 14h40
Bonjour,

j'ai une ( en fait plusieurs ) question concernant la société japonaise ( que je connais très peu, malheureusement ) :
Ont-ils un recour à la grève aussi fréquent qu'en France ? Si non, par quel moyen s'exprime-t-il ( j'ai entendu dire que les cadres Japonais avaient pour habitude de faire grève en mettant un brassard autour du bras et en allant travailler avec, info ou intox ?? )

Je me pause cette question car je sais que les conditions de travail des travailleurs japonais sont bien différentes de celles des travailleurs français ( notamment en nombre d'heures par semaine ), mais que pour autant, les japonais ne s'en plaignaient pas.
Est-ce une idée reçu ou bien un constat réel ?

En fait, je pourrait étendre ma question à un domaine plus vaste : Comment les japonais organise-t-il la mobilisation sociale ?
Et comment règle-t-ils les conflits sociaux si il ne font pa grève ? ( je ne prétends pas que la grève est le seul moyen de résoudre un conflit, loin de là )

voilà, j'espère que j'ai réussit à me faire comprendre, ce qui, à la relecture de mon texte, ne ma pas parut si évident que ca :wink:

skydiver
02/02/2005, 14h52
Le droit de grève existe au Japon. Les grévistes peuvent s'abstenir de travailler mais, généralement, ils expriment leur mécontentement par le port du brassard que tu évoques. Les cadres ne sont d'ailleurs pas les seuls concernés par cette méthode, comme j'ai pu le voir au sein de mon entreprise avec du personnel d'éxécution.

Le consensus social est plutôt de mise au Japon et les tractations patronnat/syndicats se déroulent avant le déclenchement des conflits sociaux.
Parfois, en cas d'échec, on peut voir des cortèges de manifestants soigneusement encadrés dans les rues.

A titre personnel, j'estime que si les Japonais ne se plaignent guère de leurs conditions de travail, c'est qu'il s'agit en partie d'un phénomène culturel/historique. D'autre part, les entreprises nippones traitent souvent plus correctement leurs employés que ne le font les françaises.

skydiver
02/02/2005, 20h05
On peut, à mon sens, rapprocher l'attitude syndicale japonaise de celle qui prévalait en Allemagne jusqu'à une période récente. Les clivages politiques existent mais sont quelque peu freinés par ce qu'un pourrait appeler "l'interêt supérieur". Ce dernier s'applique à l'entreprise et au pays. Le phénomène d'emploi à vie a, bien entendu, contribué à cet état de fait.

Je prendrai maintenant un exemple négatif qui a marqué les relations sociales d'une partie de mon entreprise.
Un employé (agent d'éxécution) délégué syndical et gréviste systématique a observé une attitude jusqu'auboutiste vis à vis de sa hiérarchie suite à un conflit portant sur la mobilité intérieure. Son encadrement et sa maîtrise ont considéré qu'il fallait le mettre à l'index afin qu'il rentre dans le rang. De ce fait il a été isolé dans son service, sans travail affecté. Car le Japon c'est aussi cela, la pression sur l'individu loin de l'angélisme et de l'union de façade.
Sa rébellion s'est poursuivie, les relations sont devenues tendues à l'excès jusqu'à des accusations de violences subies de la part de ses supérieurs hiérarchiques. Après un dépôt de plainte pour voie de faits, notre employé Japonais est venu en France, au siège de notre société, afin de manifester sa colère auprès de nos clients Japonais et non Japonais qui ont été surpris pour le moins.
La fin de l'histoire correspond à une mise en garde sévère de la direction française de l'entreprise à l'encontre de sa branche au Japon. Un rappel des règles élémentaires de respect des individus et l'interdiction absolue d'exercer des représailles violentes une fois de plus. L'employé en cause a, quant à lui, démissionné après accord financier avalisé par la direction en France.
Intéressant à savoir, le syndicat à tendance communiste auquel appartient l'employé dont il est question à fait profil bas et l'a laissé se débrouiller lors du non respect des codes sociaux classiques.
Comme quoi, même au Japon, les relations sociales connaissent des ratés et des limites.

MeTaTrO
02/02/2005, 20h17
Mille merci pour cette exemple très riche d'enseignements !

Je dois dire que je ne suis que partiellement surpris concernant l'attitude qu'a adopté l'entreprise face a cet employé, car j'avai déja eu vent de cette technique au Japon ( bien qu'elle ne s'applique pas que là-bas ) qui consiste à isoler les rebelles afin de les soumettre.
Par contre, la réaction du syndicats me suprend beaucoup plus. Est-ce qu'en isolant l'employé du système de l'entreprise, celle-ci l'isole aussi de son syndicat ?? J'avoue que je ne comprends pas quel été l'intérêt du syndicat à ne pas réagir ou au moins soutenir l'employé isolé.

gatchan3
03/02/2005, 03h20
dans un reportage sur l'usine Toyota en France, le patron japonais allait manger avec les ouvriers à la cantine et son bureau n'était pas dans une pièce particulière mais au milieu des autres employés.

mais vu que l'emplois à vie disparait je me demande si les patrons au Japon sont devenus un peu comme certains patrons occidentaux, genre " c'est moi le Boss, donc j'embauche et je débauche quand je veux et vous l'a fermés car c'est nous qui créons la richesse et c'est grâce à nous que vous travaillez".(ok je caricature :mrgreen: mais ya comme même une part de vérité :wink: )

Ao
03/02/2005, 13h59
salut tout le monde,

j'ai entendu dire, que le mot "grève" n'éxister même pas dans le dictionnaire japonais. humm...


@++++++

skydiver
03/02/2005, 18h36
Et bien c'est faux! Cela fait partie des idées reçues, véhiculées par des médias incompétents (pléonasme parfois) qui ne connaissent pas grand chose du Japon et surenchérissent dans les clichés.
Même si rare, la grève existe bien au Japon où, comme en France, des employés ne travaillent pas pendant des périodes courtes en général. Les "grèves à rallonge" restent, quant à elles, anecdotiques.
Les employés du secteur administratif de Sofmap ont observé une grève d'une 1/2 journée avec cortège dans le quartier de Umeda au mois de décembre dernier.

Aelooker
03/02/2005, 22h16
Le cas des conflits sociaux au Japon me parait assez révélateur.
On en a une vision finalement assez lisse: l'histoire des brassards, peu de manifestations, etc... comme s'il y avait une régulation réalisée en interne assez réussie.

Pourtant, l'individu a une marge de manoeuvre pour exprimer son opinion plus que limité: l'exemple que met en avant skydiver me parait assez net.

J'ai parfois l'impression qu'il y a deux logiques: une logique de conciliation ou tout le monde cherche à éviter les heurts; et puis, passé, un certain stade, une violence sociale palpable si l'on sort des limites imparties par le groupe en ayant des revendications trop marquées.


Le passage d'une logique de conciliation à une logique d'exclusion me parait bref, brutal.
C'est un avis tout ce qu'il y a de personnel (et écrit sans trop réfléchir, j'avoue...).

MeTaTrO
04/02/2005, 18h51
Ce que tu dis constitue une nuance interessante,

Merci :wink: