kaminari
18/01/2005, 07h11
Ivan MORRIS, sujet de sa très Gracieuse Majesté Britannique (1925 - 1976) fut considéré, tout au long de sa carrière, d'abord à la BBC, puis au Foreign Office, et enfin comme professeur à l'Université de Columbia (USA), comme un spécialiste politique du Japon contemporain.
Mais son activité littéraire a également fait de lui une référence pour la traduction de plusieurs textes importants relatifs à la culture de l'époque de Heian (794 - 1185), âge d'or de la civilisation japonaise, dominée par les raffinements paisibles de la vie de cour des aristocrates de Heian-Kyô (la Kyôto de l'époque).
Un jour, MISHIMA Yûkio lui suggéra qu'en cantonnant son activité littéraire à cette époque particulière, quoique féconde, de l'histoire japonaise, il risquait de passer toujours à côté d'une autre composante importante de l'esprit japonais, beaucoup plus dure et tragique.
Fort de cette remarque, Ivan MORRIS se pencha alors sur la vie de certains hommes d'action " dont les courtes vies ne furent que tumultes et batailles ".
Il nous livre au terme de ce travail un ouvrage empreint de sensibilité, à la fois éclairant et attachant, relatant dans l'ordre chronologique (vers le 4è siècle, jusqu'à nos jours) la vie de neuf héros, vénérés comme tels dans la conscience collective japonaise.
Que ceux qui sont à priori allergiques aux histoires de samouraî et autres narrations épiques et sanguinolentes ne se trompent pas sur la nature de cet ouvrage . Il ne s'agit pas d'un livre se complaisant dans l'exaltation du sang, mais, au travers de la vie tragique de ces héros, d’en situer l'action au regard du contexte historique, politique et culturel, afin de mettre à jour certains schémas mentaux qui font partie intégrante de l'esprit japonais d'hier et (encore) d'aujourd'hui.
Aussi, qu'il s'agisse de guerriers (Yamato Takeru, Yorozu, Yoshitsune…) ou d'intellectuels (Sugawara no Michizane), de gens simples poussés à bout par une existence misérable (Amakusa Shirô), ou de fonctionnaires préférant fomenter une révolte plutôt que de contempler passivement l'injustice (Ôshio Heihashirô), tous ces héros japonais ont en commun d'avoir pris le parti de la sincérité de leur cœur (Makoto), et d'avoir été pour cela écrasés par des forces supérieures en nombre. Le tragique de ces destins libres mais inéluctablement brisés fait ressortir l'idée d'impermanence de toutes choses (mono no aware), constante psychologique forte chez les japonais.
Ces personnages se sont tous soulevés contre un certain ordre établi, et malgré leurs premiers succès, il était certain qu'il étaient irrémédiablement voués à suivre la trajectoire de l'échec total. C'est parce qu'il l'ont tous acceptés sans fléchir, jusqu'au sacrifice suprème, sans jamais renoncer à leur idéal, qu'ils sont restés au fond du cœur de tous les japonais. Cette sympathie pour le vaincu (Hôganbiiki) est un autre trait commun à l'univers Nippon.
Ce modèle de l'échec est selon l'auteur un trait distinctif de l'archipel du soleil levant, l'Occident n'en connaissant pas de comparable. Voilà qui peut apporter la contradiction à ceux qui sont encore persuadés qu'on ne peut réduire la mentalité japonaise qu'à la recherche de l'efficacité.
L'ouvrage finit par une évocation de " l'épopée " Kamikaze de la seconde guerre mondiale, horrible et émouvante...on y lit des choses tragiques à 100 lieues de tout fanatisme. La vie de nombre de jeunes japonais y pris fin tragiquement, comme la fleur du cerisier,...
Aujourd'hui épanouie
Ses pétales demain dispersés par le vent,
Telle est la fleur de notre vie :
Comment son parfum serait il éternel ?
Mais son activité littéraire a également fait de lui une référence pour la traduction de plusieurs textes importants relatifs à la culture de l'époque de Heian (794 - 1185), âge d'or de la civilisation japonaise, dominée par les raffinements paisibles de la vie de cour des aristocrates de Heian-Kyô (la Kyôto de l'époque).
Un jour, MISHIMA Yûkio lui suggéra qu'en cantonnant son activité littéraire à cette époque particulière, quoique féconde, de l'histoire japonaise, il risquait de passer toujours à côté d'une autre composante importante de l'esprit japonais, beaucoup plus dure et tragique.
Fort de cette remarque, Ivan MORRIS se pencha alors sur la vie de certains hommes d'action " dont les courtes vies ne furent que tumultes et batailles ".
Il nous livre au terme de ce travail un ouvrage empreint de sensibilité, à la fois éclairant et attachant, relatant dans l'ordre chronologique (vers le 4è siècle, jusqu'à nos jours) la vie de neuf héros, vénérés comme tels dans la conscience collective japonaise.
Que ceux qui sont à priori allergiques aux histoires de samouraî et autres narrations épiques et sanguinolentes ne se trompent pas sur la nature de cet ouvrage . Il ne s'agit pas d'un livre se complaisant dans l'exaltation du sang, mais, au travers de la vie tragique de ces héros, d’en situer l'action au regard du contexte historique, politique et culturel, afin de mettre à jour certains schémas mentaux qui font partie intégrante de l'esprit japonais d'hier et (encore) d'aujourd'hui.
Aussi, qu'il s'agisse de guerriers (Yamato Takeru, Yorozu, Yoshitsune…) ou d'intellectuels (Sugawara no Michizane), de gens simples poussés à bout par une existence misérable (Amakusa Shirô), ou de fonctionnaires préférant fomenter une révolte plutôt que de contempler passivement l'injustice (Ôshio Heihashirô), tous ces héros japonais ont en commun d'avoir pris le parti de la sincérité de leur cœur (Makoto), et d'avoir été pour cela écrasés par des forces supérieures en nombre. Le tragique de ces destins libres mais inéluctablement brisés fait ressortir l'idée d'impermanence de toutes choses (mono no aware), constante psychologique forte chez les japonais.
Ces personnages se sont tous soulevés contre un certain ordre établi, et malgré leurs premiers succès, il était certain qu'il étaient irrémédiablement voués à suivre la trajectoire de l'échec total. C'est parce qu'il l'ont tous acceptés sans fléchir, jusqu'au sacrifice suprème, sans jamais renoncer à leur idéal, qu'ils sont restés au fond du cœur de tous les japonais. Cette sympathie pour le vaincu (Hôganbiiki) est un autre trait commun à l'univers Nippon.
Ce modèle de l'échec est selon l'auteur un trait distinctif de l'archipel du soleil levant, l'Occident n'en connaissant pas de comparable. Voilà qui peut apporter la contradiction à ceux qui sont encore persuadés qu'on ne peut réduire la mentalité japonaise qu'à la recherche de l'efficacité.
L'ouvrage finit par une évocation de " l'épopée " Kamikaze de la seconde guerre mondiale, horrible et émouvante...on y lit des choses tragiques à 100 lieues de tout fanatisme. La vie de nombre de jeunes japonais y pris fin tragiquement, comme la fleur du cerisier,...
Aujourd'hui épanouie
Ses pétales demain dispersés par le vent,
Telle est la fleur de notre vie :
Comment son parfum serait il éternel ?