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Afficher la version complète : Economie Quand le Japon s'éveillera



TB
04/03/2010, 14h32
« En fait, et malgré les réels efforts du présent gouvernement de couper les dépenses inutiles du clientélisme de l’ancien parti au pouvoir, le Japon sera obligé cette année d’emprunter plus qu’il ne remboursera. Cela s’appelle, techniquement, une faillite. Mais vu le caractère particulier de sa dette, une dette financée par l’épargne, le gouvernement japonais pense avoir encore la possibilité de se tourner vers les marchés internationaux. La semaine dernière, des émissaires du ministère des finances ont donc fait le tour des capitales européennes. Cette information, bien entendue, n’a à aucun moment été diffusée à la télévision. Surtout ne pas parler de cet échec. Les lendemains seront très brutaux. Pourtant, autant Bloomberg que le Financial Times rapportent les faits. Les observant depuis des mois, je regarde la mise en place de cette spirale de la mort qui se met en place, non sans y voir vu au passage l’effet de considérations politiques évidentes. La droite voulait privatiser la poste, le plus gros portefeuille d’épargne au monde, celui qui permet de financer cette dette gigantesque et la gauche a gelé cette privatisation. On ne lui fera pas de cadeaux malgré des coupes budgétaires généralement saluées. Mais couper les crédits du bâtiment pour créer une allocation d’aide à l’enfance et réaliser la gratuité totale de la scolarité jusqu’à 16 ans n’a jamais plus aux agences de notations. Standart and Poors vient donc d’abaisser la notation de la dette japonaise à long terme de AAA à AA. Ce n’est pas une grosse dégradation. Cela ne se traduira que par une augmentation de quelques points de bases sur le marché obligataire. Mais sur les sommes en jeu, quelques points, ça alourdit énormément la dette. Et cette dégradation de la dette sera le prétexte pour abaisser encore un peu.

Et c’est le moment que le Japon choisit pour commencer à internationaliser sa dette. En pleine crise Greque (un scénario très similaire, au passage). Or quand un pays est dans le collimateur des agences Fitsch, S&P et consort, ces mêmes agences qui ont noté AAA, voire sponsorisé des CDO pourries en empochant des commissions au passage ou noté AAA Bernard Maddof, dites vous bien qu’on ne vous lâche plus. Le Japon a bénéficié de sa solide économie et a tiré sur la corde de la dette autant qu’il le pouvait. La montée en puissance de nouvelle économies bien plus dynamiques, innovantes et accueillantes a progressivement laminé cette position. Pire, le Japon a mis en place un protectionnisme culturel très fort dont les visites de Koizumi à Yasukuni (un sanctuaire dédié aux victimes de guerres et où sont gardé des restes de plusieurs criminels de classe A, des Hitler locaux) sont un peu le symbole extrême. De façon plus banale, « les fruits japonais sont les meilleurs », « la riz japonais est le meilleur du monde », « les agences de voyages organisent mieux les voyages », « les Japonais sont très polis », « il n’y a pas de voleurs ». Et qu’importe si les fruits japonais sont fades et ont grandit sous serre comme les fraises en décembre. Et tant pis si le riz japonais est 5 fois plus cher qu’un riz Thailandais sans empêcher son producteur de vivre dans une quasi-pauvreté.

[...]

Au Japon, en revanche, une faillite aurait des conséquences inimaginables. Un pays fragilisé par 20 ans de crise, avec une jeunesse en errance. Sans compter qu’il en découlerait la disparition pure et simple de l’épargne, ou tout au moins une partie… Les « spécialistes » qui découvrent la « crise grecque » me font rire, finalement, même si ce n’est qu’une façon de parler, et que ces types payés des fortunes pour aller bavarder sur France-Info ou dans des colloques ne sont que de pauvres crétins. Ils ont « découvert » les subprimes en 2007, quand le marché était dors et déjà retourné, et certains en avaient acheté à tour de bras sans même le savoir quand ils se gavaient de CDO (Collateralised Debt Obligation) notées triple A… Pourtant nous sommes en démocratie, l’information est disponible. Sur Bloomberg, par exemple, dès 2006, certains « vrais » spécialistes avertissaient qu’on allait droit dans le mur. Sur FT également. Eh bien nos experts en bavardage sont incroyablement muets concernant le prochain effondrement de la deuxième puissance mondiale. Il y en a même qui voient la croissance y revenir, « tirée par les exportations vers la Chine ». Pourtant, à mots très feutés -normal, c’est une information délirante, incroyable, impensable-, sur Bloomberg comme sur le FT, je regarde l’iceberg approcher depuis des mois. Mais non, on continue comme de si rien n’était…220% de dette publique, ça ne mérite pas la une. La Grèce, avec ses 70%, c’est beaucoup plus préoccupant… »

Lire la suite sur le blog de Suppaiku : De quand on va se mettre à parler du Japon… (http://suppaiku.com/2010/03/04/de-quand-on-va-se-mettre-a-parler-du-japon…/)

Trax
05/03/2010, 11h07
AA j'ai réussi à tous lire, quelque constat amère mais qui semble d'une grande lucidité.

Excellent article, très bien écrit.

lerenardmagique
05/03/2010, 17h06
bon article. On commence un peu a parler d'une possible banqueroute du Japon dans les magazines eco, mais comme il y a encore des affaires a faire, on occulte l'etat du pays en general....
En fait, quelque chose m'a choque dans cet article : la conclusion, ces trois dernieres phrases ou on parle de japonaises aux bras de riches chinois. Je trouve que c'est un peu de la provoc, ca donne une image de pays vaincu...Pour etre plus provoc encore, on aurait pu ecrire pute a GI Americain ou domestique pour Emiratis...
Non, contrairement a l'auteur de cet article, je ne souhaite pas la faillite du Japon et sa chute dans le chaos. Cela ne fera pas forcement avancer les choses la-bas. Contrairement a l'Europe et au vieux monde en general, ou pour faire un petit pas en avant et metamorphoser un peu nos societes, on doit tout casser et foutre le bordel...

Trax
05/03/2010, 18h11
ou pour faire un petit pas en avant et metamorphoser un peu nos societes, on doit tout casser et foutre le bordel...

On tombe vite dans la bonne vieille réplique "rien de mieux qu'une guerre pour relancer l'économie", mécaniquement oui ça fonctionne mais outre le bon plaisir des économistes les populations elles ... aïe

delwin
08/03/2010, 02h50
Très bon article, très intéressant.
Je ne vais pas revenir sur la situation economique du Japon, mais pour etre dans une des plus grandes entreprise Japonaise,
je peux vous dire que c'est un miracle que ces grands groupe existent encore.
Le management est inexistant, les nouveautés ignorées, les employées très mauvais, les jeunes réduits a faire du power point, les couts délirants et aucune flexibilité des employées (la plupart d'entre eux sont inutilisables pour les marches étrangers, alors que le marche Japonais décroit et donc ne nécessite plus autant de personnes).
Les simples bases du business sont aussi inexistante que le fromage francais a la cantine le midi. (super métaphore OK...)
Je pourrais palabrer des heures, mais pour être dans ce petit monde et côtoyer pas mal d'autres entreprises (Toyota, Mitsubishi, Sony etc), je suis catastrophé en voyant la realite)
Je ne suis donc pas surpris de l'état du pays puisqu'il est gouverné par le même style de personnes. Le marché Japonais étant également protégé aux frontières, les bases de ces entreprises sont sauvées mais pour combien de temps,..
Exemple: Les TV plasma. Les prix sont artificiellement hauts au Japon par ententes entre la compétition. (J'en sais quelque chose)
Pour permettre de vendre ric rac a l'étranger et quand même faire des profits. La concurrence est bloquée aux frontieres par des fortes taxes. (LG, Samsung)
Sinon, Panasonic, Sony, Toshiba seraient obliges de fermer leurs Business Unit TV très vite.

J'arrête mais la mais c'est bien la réalité.

zev
08/03/2010, 05h22
Ca fait assez peur en effet....
Je dirais que dans le monde de la recherche c'est un peu pareil.
Nombrilisme et suivisme, on prend un article, on epluche les methodes qu'on ameliore un peu, pui au lieu de faire les analyses sur la souris par exemple, on fait ca sur le macaque et hop, un article. Et tout le monde applaudit...
Aussi je n'ai jamais compris comment avoir fait 5 ans d'etudes en biologie on puisse trouver un poste en banque par exemple, le systeme universitaire japonais est aberrant.

tchotto
15/03/2010, 02h01
Bravo pour cet article ! Voilà ici abordé un sujet qui contribuera à conserver au forum lejapon.org - voire à le rehausser un peu - le niveau de qualité de l'information disponible dans ses pages concernant le Japon du 21 ème siècle . Merci TB pour le lien et bravo à Suppaiku pour la lucidité de son analyse et le cran de ne pas tourner autour du pot en composant son article sur l'état de l'économie nippone en général et en nous soumettant ses observations " vues de l'intérieur " à l'ère du " politiquement correct " globalisé où il est plus facile de se voiler la face et de cacher au " peuple " la dure réalité et le manque de perspectives positives que les politiques peuvent lui offrir . Comme si le peuple était " c..." et ignard au point de ne pas voir clair !Sans être économiste, déjà lors de mon séjour de 2 ans au pays du soleil levant - il y a plus de 30 ans déjà ! - j'ai immédiatement perçu l'économie du Japon comme fébrile et plus fragile que l'on essayait de nous le faire croire ! J'ai toujours utilisé le terme de " Hanabi " pour exprimer et marquer le caractère temporaire sinon ephémère de ces économies montantes qui arrivent à des sommets en 20~30 ans - voire moins même - alors que l'Occident a mis 150 ans pour y arriver en se cassant plusieurs fois la gueule, d'ailleurs. . ! En économie comme en tout dans l'activité humaine, la vitesse rapporte . Mais on oublie trop souvent que la vitesse tue aussi ! Parfois à petit feu ! Et , si l'on ne sait trop clairement où l'on va- même nos dirigeants qui naviguent bien souvent " au pif " - l'on oublie aussi trop vite " d'où l'on vient " ! La crise n'est pas finie ! Seuls l'inflation d'une part, et le départ à la pension des générations du "baby boom d'après 1945 " de l'autre donneront un semblant de répit et de reprise en permettant éventuellement - et temporairement ! - le plein emploi avant de replonger dans une crise encore plus sévère ! L'humanité doit absolument changer son fusil d'épaule en reconsidérant peut -être aussi l'économie comme un moyen et non une fin en soi ! L'homme doit trouver " son intérêt ailleurs " ! Du pain sur la planche ! Il y a encore tant à faire sur cette bonne vieille planète Terre pour que l'Homme y soit et s'y sente bien ! ! Non ? ! Ja ne ! Ciao !